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INTRODUCTION.

quoi il place au fond des cercles infernaux Brutus et Cassius, meurtriers de César, et, en un autre de ces cercles, Boniface VIII et Clément V, tandis qu’il montre dans le ciel un trône préparé pour Henri VII, repoussé par eux de l’Italie, et mourant, empoisonné peut-être, au moment où ses armes paraissaient près d’assurer le triomphe de l’Empire. Il n’est pas jusqu’à l’excommunié Manfred, mort aussi en combattant pour la même cause, qui ne doive, après un temps passé dans le séjour où se purifient les âmes, siéger parmi les Bienheureux. En tout cela le but du Poëte, sa pensée intime, se manifestent clairement.

Mais si de ces généralités l’on descend aux détails, là on se perd. On est réduit à conjecturer sans données suffisantes, à fouiller sous les mots, à deviner ce qui se dérobe sous le voile d’images obscures, d’emblèmes équivoques et d’allusions énigmatiques ; et c’est qu’il fallait à la fois être entendu des uns et ne l’être pas des autres, parler un langage au moyen duquel le sens secret, compris seulement des initiés, fût comme recouvert d’un sens apparent qui ne pût blesser le Pouvoir dont on ne provoquait pas impunément les colères formidables, ou du moins qui ne fournît pas de prise à des accusations de ce genre de délits que punissaient les bûchers des inquisiteurs.

De là des ténèbres aujourd’hui, le plus souvent impénétrables. Assez peu importent, après tout, ces