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est le syllogisme qui en moi l’a conclue [1] si nettement que, près d’elle, toute démonstration me paraîtrait obtuse. J’ouïs ensuite : « L’ancienne et la nouvelle proposition [2] qui te conduit à cette conclusion, pourquoi la tiens-tu pour parole divine ? » Et moi : — La preuve qui me découvre le vrai sont les œuvres [3] qui suivirent, pour lesquelles jamais la nature ne chauffa le fer, ni ne battit l’enclume. Il me fut répondu : « Dis, qui t’assure que ces œuvres furent ? La parole même qu’il s’agit de prouver, elle seule te le jure [4]. » — Si le monde, dis-je, vint au christianisme sans miracle, celui-ci est tel que les autres n’en sont pas le centième, que tu sois entré pauvre et à jeun dans le champ pour semer la bonne plante, qui fut vigne autrefois et maintenant est devenue ronce. Cela fini, la haute cour sainte entonna, de sphère en sphère, un Louons Dieu [5] dans la mélodie qui là-haut [6] se chante. Et ce baron [7], qui, ainsi de rameau en rameau m’examinant, m’avait déjà tiré jusqu’aux dernières feuilles, recommença : « La grâce qui courtise ton âme, t’a fait jusqu’ici ouvrir la bouche comme tu devais l’ouvrir ; de sorte que j’approuve ce que tu as produit au dehors ; mais il convient maintenant d’exprimer ce que tu crois, et ce qui détermina ta croyance. » — O Père saint ! ô esprit, qui vois ce que tu crus si fermement, qu’au sépulcre tu vainquis de plus jeunes pieds [8], commençai-je, tu veux que je manifeste ici la forme de ma vive croyance, et tu en as aussi demandé la raison. Je réponds : Je crois en Dieu unique et éternel, qui, non mû, meut tout le ciel par l’amour et le désir : et

  1. A conclu cette foi.
  2. L’Ancien et le Nouveau Testament ; les propositions, l’enseignement qu’ils contiennent.
  3. Les miracles.
  4. Nous suivons la ponctuation de Porticelli et du P. Parenti, qui mettent le point d’interrogation après fosser, et non pas après provarse. La phrase est plus correcte, et le sens plus net.
  5. Un Te Deum laudamus.
  6. Dans le Ciel.
  7. Au temps de Dante, on appliquait aux saints les dénominations honorifiques usitées dans la société d’alors. Le même usage, au reste, restait chez nous, et partout, durant le Moyen âge.
  8. Quoique devancé par saint Jean au sépulcre de Jésus-Christ, saint Pierre y entra le premier. — Joan., XX.