m’apparut Jupiter entre le père et le fils qu’il tempère [1] ; et de là me furent claires leurs variations de lieu : et tous les sept [2] me montrèrent leur grandeur, et leur vitesse, et leurs distances. Pendant qu’avec les éternels Gémeaux je tournais, la petite aire qui nous rend si fiers m’apparut tout entière, des collines aux mers [3] : puis vers les beaux yeux je tournai mes yeux.
CHANT VINGT-TROISIÈME
Comme l’oiseau qui repose entre les feuilles aimées, près du nid de ses doux nouveau-nés, pendant la nuit qui nous cache les choses, pour jouir de leur vue désirée, et pour leur chercher la pâture, en quoi agréables lui sont les dures fatigues, devance l’heure sur la plus haute branche, et avec un ardent désir attend le soleil, et fixement regarde, épiant la naissance de l’aube ; ainsi près de moi, debout et attentive, se tenait ma Dame, tournée vers la plage sous laquelle le Soleil montre le moins de hâte [4] ; de sorte que, la voyant suspendue en une vive attente [5], j’étais comme celui qui, désirant, voudrait ce qu’il n’a pas, et espérant s’apaise : Mais peu fut d’intervalle entre l’un et l’autre temps, je dis entre l’attendre et voir le ciel devenir de plus en plus brillant. Et Béatrice dit : « Voici l’armée du Christ triomphant, et tout le fruit recueilli du mouvement de ces sphères [6]. » Son visage me parut tout en feu, et d’allégresse
- ↑ Jupiter, situé entre Saturne et Mars, tempère, selon la pensée du Poète, le froid du premier et la chaleur du second.
- ↑ Les sept globes planétaires.
- ↑ Littéral : aux embouchures des fleuves.
- ↑ Le midi, où le mouvement du soleil paraît plus lent, l’ombre des objets, à mesure qu’il monte au-dessus de l’horizon, diminuant toujours avec plus de lenteur.
- ↑ Suivant une autre interprétation, on pourrait traduire encore : de sorte que, voyant son regard indécis errer vaguement.
- ↑ Le fruit de toutes les bonnes influences que répandent ces sphères en tournant.
