Page:Dante - La Divine Comédie, trad. Lamennais, 1910.djvu/311

Cette page n’a pas encore été corrigée

dernières puissances [1], tant, d’acte en acte, s’abaissant, qu’elle ne crée plus que de brèves contingences [2] : et ces contingences, j’entends que ce sont les choses engendrées, que de semence ou sans semence produit le ciel en se mouvant. Leur cire [3] et ce qui la modèle [4], ne sont pas toujours uniformes ; ce pourquoi au-dessous le signe idéal [5] plus ou moins reluit à travers : d’où il advient que, dans la même espèce, les arbres portent un fruit meilleur ou pire, et que vous naissez avec des génies divers. Si la cire était parfaitement disposée, et que le ciel fût dans sa plus haute vertu, la lumière du sceau paraîtrait tout entière ; mais toujours amoindrie la rend la nature, opérant comme l’artiste qui a l’habitude de l’art et une main qui tremble. Si au contraire, avec son ardent amour et sa claire vue, la première vertu dispose et empreint, toute perfection alors s’acquiert [6]. Ainsi jadis la terre fut faite apte à toute la perfection animale [7] ; ainsi conçut la Vierge. De sorte que je loue ton opinion, que l’humaine nature ne fut et ne sera jamais telle qu’elle fut en ces deux personnes. Si plus avant je n’allais pas : — Comment donc, dirais-tu, celui-là [8] fut-il sans pair ? Mais, pour que clair devienne ce qui ne l’est pas, pense qui il était, et la cause qui le mut à demander, lorsqu’il lui fut dit : Demande ! Point n’ai-je parlé de manière que tu ne pusses bien voir qu’était roi celui qui demanda la science, afin de suffire à l’office du Roi, non pour savoir le nombre des moteurs de là-haut, ou si jamais la necesse avec un contingent engendre la necesse [9] ; non si est dare primum motum esse [10],

  1. De Ciel en Ciel, jusque dans le dernier.
  2. La lumière essentielle, éternelle, source des vertus informatrices, réfléchie de monde en monde, comme Dante l’a dit ailleurs, et affaiblie par ces réflexions, ne produit dans le monde le plus bas que des êtres imparfaits et de courte durée.
  3. Leur matière.
  4. La vertu qui informe la matière.
  5. L’idée incréée, le Verbe, dont Dante a parlé plus haut.
  6. Si le Ternaire divin, la puissance, l’intelligence, l’amour, dispose lui-même directement et empreint la matière, l’œuvre atteint toute la perfection.
  7. Lorsque de la terre Dieu lui-même forma l’Homme, le plus parfait des animaux.
  8. Salomon.
  9. Si une prémisse nécessairement vraie avec une autre qui n’est pas nécessairement vraie, engendrent une conséquence nécessaire.
  10. Si on doit admettre un premier mouvement, c’est-à-dire un mouvement qui ne soit pas produit par un autre mouvement.