Page:Dante - La Divine Comédie, trad. Lamennais, 1910.djvu/217

Cette page n’a pas encore été corrigée

suaves et bonnes. Et comme le sapin, de rameau en rameau, se rétrécit en s’élevant, ainsi cet arbre en descendant, afin, je crois, que dessus nul ne monte. Du côté où le chemin était fermé, tombait du roc élevé une eau claire, qui se répandait d’en haut sur les feuilles. Les deux Poètes s’approchèrent de l’arbre, et d’au dedans, à travers le feuillage, une voix cria : « De ce fruit vous aurez disette [1]. » Puis elle dit : « Plus pensait Marie à ce que les noces [2] fussent honorables et complètes, qu’à sa bouche, qui maintenant pour vous répond. Et les antiques Romains se contentèrent d’eau pour boisson, et Daniel méprisa le manger [3], et acquit le savoir. Le premier âge fut beau comme l’or : il rendit par la faim les glands savoureux, et par la soif fit, de chaque ruisseau du nectar. Du miel et des sauterelles furent la nourriture de Baptiste dans le désert ; pour cela glorieux est-il, et aussi grand que le déclare l’évangile [4]. »


CHANT VINGT-TROISIÈME


Pendant que je tenais mes yeux fixés sur le vert feuillage, comme parfois il arrive qu’à regarder un petit oiseau la vie se perd, celui qui m’était plus qu’un père me dit : « Cher fils, maintenant viens ; plus utilement doit être employé le temps qui nous est assigné. Je tournai le visage, et non moins vite mes pas, vers les sages, qui parlaient, de sorte que point ne me coûtait l’aller. Et, tout à coup, voilà des

  1. « Vous serez privés de ce fruit, en punition de la gourmandise que vous devez expier dans ce cercle. »
  2. Les noces de Cana.
  3. Les mets délicats que lui offrait Nabuchodonosor, se contentant de simples légumes ; et, à cause de cela, il reçut le don de science.
  4. Allusion à ces paroles de Jésus-Christ : Inter natos mulierum, nullus major Joanne Baptistâ.