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Il faut observer que, dans la métamorphose de l’homme et du serpent, la fumée qu’ils exhalent tous deux va de l’un à l’autre, comme pour établir l’échange des deux substances, et qu’ils se contemplent attentivement comme pour prendre modèle de leur nouvelle forme l’un sur l’autre pendant l’action du venin.

[7] Bose, Florentin, de la famille des Donati, qui vient d’être changé en serpent, tandis que le serpent est devenu homme.

[8] Voilà en effet des tableaux où Dante se montre bien dans cette magnifique horreur sur laquelle Tasse s’est tant récrié. Hardiesse de style, fierté de dessin, âpreté d’expression, tout s’y trouve ; les trois vers qui terminent la tirade font frémir d’admiration, car ce n’est plus de l’italien, non mortale sonans ; c’est le mens divinior ; c’est l’Enfer dans toute sa majesté :

Cosi vid’io la settima zavorra
Mutar e trasmutare ; e qui mi scusi
La novità, se fior la lingua abborra.

On croit d’abord que l’imagination du poëte, lassée des supplices de Vannifucci et d’Angel, va se reposer ; quand tout à coup elle se relève et s’engage dans la double métamorphose du serpent en homme et de l’homme en serpent, sans reprendre haleine, sans user même d’une simple transition. Aussi paraît-il bientôt que Dante a eu le sentiment de sa force par le défi qu’il adresse à Lucain et à Ovide : et non-seulement il est vrai qu’il les a vaincus tous deux dans cette dernière tirade, mais il me semble qu’il s’est fort rapproché du Laocoon dans le supplice d’Angel.

C’est des trois derniers vers qu’on vient de citer qu’est tirée l’épigraphe de l’ouvrage. Elle présente plus d’un sens : Qu’ici la nouveauté m’excuse si mon langage est barbare ; ou bien, si mon langage repousse la parure ; ou enfin, si mes tableaux ne respirent qu’horreur : on a suivi cette dernière intention. Il