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dans le Ciel ou si l’abîme s’est fermé sur eux.

— Ils sont tombés, me dit-il, dans les plus noirs cachots des Enfers, où le poids de leurs crimes les retient : c’est là que tu les rencontreras si tu pénètres dans ces gouffres. Mais quand tu reverras l’heureux éclat du jour, rappelle-moi, je t’en conjure, au souvenir des miens. Adieu, tu as reçu mes dernières paroles.

Alors ses prunelles s’égarèrent dans leur orbe, et, lançant un dernier regard sur moi, il baissa la tête et se replongea parmi les autres enfants de ténèbres.

— Un jour [6], me dit mon guide, la trompette céleste éclatera sous ces voûtes profondes, et l’abîme, sollicité par une puissance ennemie, vomira tous ses morts. Alors chacun d’eux ira visiter sa froide couche, pour y reprendre sa chair et sa forme première : mais ils ne se réveilleront plus, après ces paroles dont le retentissement les poursuivra dans leur éternité [7].

Ainsi nous traversions l’horrible mélange des flots bourbeux et des ombres, et ma langue interrogeait le sombre avenir.

— Ô mon maître ! disais-je, la sentence suprême doit-elle aigrir ou tempérer les maux des réprouvés ? ou bien renaîtront-ils aux mêmes supplices ?

— Écoute tes propres maximes, répondit le poëte : La perfection d’un être est pour lui la