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effrayer par Boniface VIII, alors cardinal, qui lui persuada qu’on ne pouvait être pape et faire son salut. Célestin, homme pieux et faible, se retira dans un ermitage, et fonda l’ordre qui porte son nom.

[5] On voit ici le premier supplice que le poëte ait encore décrit : les âmes égoïstes et paresseuses y sont condamnées à une course sans fin et aux piqûres des insectes ; ce qui contraste avec leur goût pour les jouissances personnelles et leur indifférence pour les devoirs de la société. Voltaire peint, d’un seul vers ces esprits : Trop faibles pour servir, trop paresseux pour nuire.

[6] Le fleuve qu’on rencontre au vestibule des Enfers est l’Achéron. On passe après lui le Styx, ensuite le Phlégéton, et enfin le Cocyte ; car le Léthé coule au Purgatoire, où les fautes sont oubliées. C’est ainsi que Dante accommode les idées du paganisme à son Enfer chrétien.

On verra au XIVe Chant une belle allégorie sur ces quatre fleuves. Tout le monde connaît celle que Platon avait imaginée d’après la signification primitive du nom de chacun. Ce philosophe, qui en a tant conté aux Grecs, leur disait que l’âme, ornée des plus belles connaissances, sortait du sein de Dieu, pour venir habiter un corps et commencer son pélerinage. Elle oubliait d’abord, en passant le Léthé, toutes ses idées premières, et le souvenir de sa céleste patrie : bientôt elle trouvait l’Achéron, qui signifie privation de joie ; ensuite le Styx, fleuve de tristesse ; et le Cocyte, plaintes et pleurs ; enfin, le Phlégéton, douleur brûlante et forcenée, dernier degré du désespoir. Ainsi la terre était, selon Platon, le véritable Enfer, où l’âme gémissait dans les angoisses, jusqu’à ce que la mort vînt rompre ses liens, et la rejoindre à la source de son être et de sa félicité.

[7] Le vieillard qui passe les âmes est quelque ange de ténèbres qui trouve ici son Enfer.

[8] On ignore à quel passage le nocher fait allusion ;