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CHANT III


ARGUMENT


Les deux poëtes arrivent à une immense porte ouverte en tous temps. Après avoir lu l’inscription, ils passent dans la première enceinte de l’Enfer, que le fleuve Achéron partage en deux moitiés. Description du premier supplice. — Discours de Caron.

  C’EST MOI QUI VIS TOMBER LES LÉGIONS REBELLES ;
  C’EST MOI QUI VOIS PASSER LES RACES CRIMINELLES ;
  C’EST PAR MOI QU’ON ARRIVE AUX DOULEURS ÉTERNELLES,
  LA MAIN QUI FIT LES CIEUX POSA MES FONDEMENTS :
  J’AI DE L’HOMME ET DU JOUR PRÉCÉDÉ LA NAISSANCE,
          ET JE DURE AU DELÀ DES TEMPS.
  ENTRE, QUI QUE TU SOIS, ET LAISSE L’ESPÉRANCE [1].


Je vis ces paroles qu’éclairait un feu sombre, écrites sur une porte, et je dis :

— Maître, ces paroles sont dures.

— C’est ici, me répondit le sage, qu’il faut laisser toute crainte ; ici doit expirer toute faiblesse : nous voilà dans ces lieux où je t’ai dit que tu verrais les tribus désolées, pour qui il n’est plus de félicité.

Il dit ; et, tournant vers moi son visage assuré, il me prit par la main, et m’introduisit dans ces horreurs secrètes.

Les soupirs, les pleurs et les gémissements qui s’élevaient dans cette nuit sans étoiles