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gèreté, et non pour assigner sa véritable forme, qui n’était pas déterminée.

Mais l’ombre différait de l’âme, en ce qu’elle retenait la figure et l’apparence du corps. Elle en était le spectre, le simulacre, le fantôme ; et, bien qu’elle fût d’une matière assez ténue pour échapper au toucher, cependant elle était visible et conservait les idées, les goûts et les affections que le mort avait eus dans sa vie.

Les noms d’ombre, de spectre, de simulacre et de fantôme signifient donc tous image et représentation de l’homme. Les mânes signifient restes, et désignent ce qui survit à l’homme, ce qui est permanent après lui. Toutes ces expressions emportent la même idée : ce sont les mânes ou l’ombre d’un mort qu’on rencontre aux Enfers ; c’est encore cela qu’on voit errer autour de son tombeau. Observez pourtant que le génie du défunt était autre chose : il gardait le sépulcre, et se montrait sous la forme de quelque animal, symbole de la qualité dominante du mort. Énée, faisant des libations à son père, voit sortir du mausolée un beau serpent, emblème de la haute sagesse de ce héros. Il arrivait quelquefois qu’un homme voyait son génie avant de mourir ; mais le cas était rare, et on ne compte guère que Dion, Socrate et Brutus qui aient eu cet avantage. Nos anges gar-