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lège et non point un délit spécial qui est puni. Si, en dehors du lieu consacré, le violateur a eu le vol pour mobile, il sera atteint comme voleur, et la peine sera aggravée si le crime a eu pour auteurs des fossoyeurs ou autres personnes chargées d’enterrer les morts. C’est donc encore le voleur que l’on poursuit avant tout.

Peut-être est-il possible d’expliquer cette absence de législation spéciale aux violations de sépultures par ce fait qu’elles constituaient en règle générale un sacrilège, toute inhumation étant effectuée en lieu saint, et que les peines du sacrilège figuraient parmi les plus sévères. Il ne faudrait pas toutefois pousser cette idée trop loin, car les décisions qui nous sont connues montrent qu’en certains cas on se départissait singulièrement de la sévérité que semblaient imposer la lettre et l’esprit de la loi. Ainsi Dareau nous rapporte que des fossoyeurs ont été condamnés, « les uns au blâme, d’autres au bannissement, d’autres enfin aux galères, pour violement de sépulcres »[1]. Le 10 septembre 1752, un fossoyeur à Paris est condamné au carcan avec ces mots : voleur de suaire, à la flétrissure et aux galères pour trois ans, parce qu’il avait dépouillé des cadavres de leurs suaires, tandis que le 12 juillet 1683 un autre avait été simplement admonesté et condamné à l’aumône. Il est vrai que ce dernier avait déterré le cadavre pour le vendre à un chirurgien, et que l’indulgence des juges semblait se manifester particulièrement quand l’intérêt de la science était invoqué comme une circonstance atténuante du crime. On trouve enfin, dans tous les recueils du temps, un arrêt curieux rendu contre des religieux qui avaient exhumé les corps des seigneurs de Créqui pour s’ap-

  1. Dareau, Traité des injures, chap. I, sect. 3 in fine, t. 1, p. 211.