Si un Auteur Dramatique choqué de la tiédeur des François ſur la conduite du Miniſtére, vouloit réformer leurs mœurs à cet égard, s’il parvenoit à les rendre des Citoyens plus chauds, il pourroit arriver qu’il les rendroit en même tems turbulens, indociles, préſomptueux, & ces ardens Citoyens abuſant d’un excellent motif ne ſe ſeroient corrigés d’un défaut que pour en contracter d’autres très préjudiciables à leur bonheur particulier, & à celui de l’État en général. Il convient donc de leur laiſſer leur indifférence en matiere d’État. Les ſept péches mortels que les François commettent auſſi fréquemment que perſonne, & tant de ridicules qu’on leur reproche, offrent aſſés de matiere aux génies Dramatiques.
Il eſt dans les mœurs des Anglois de mépriſer les Étrangers, leur impoliteſſe eſt aſſurément très repréhenſible, cependant leurs Auteurs Dramatiques ſemblent autoriſer ce mépris & le nourrir par les peintures outrées qu’ils font des Étrangers & ſurtout des François. Vous condamneriez ces tableaux ſans doute : mais comme il eſt utile à la Conſtitution Angloiſe, que les Anglois ſe croyent les premiers hommes du monde, & comme le maintien de leurs loix éxige un plus grand nombre de véritables Citoyens, on a grand ſoin pour leur inſpirer le Patriotisme, de leur dire qu’ils reſſemblent aux Romains, & que perſonne ne leur reſſemble : il en réſulte que beaucoup d’entre eux ont réellement les Vertus Romaines ; mais qu’ils en ont en même