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envers ceux qui vous déplaiſent : c’eſt parce que vous voulez rendre odieux des gens qui ne vous ont jamais fait de mal, c’eſt parce que vous dénigrez une profeſſion que des Saints & des Philoſophes approuvent & qu’ils encouragent : c’eſt parce que vous accuſez de mauvaiſes, mœurs & de friponerie des gens que vous ne connoiſſez que de vûe & qui ne vous ont aſſurément jamais rien volé : c’eſt par ce qu’en voulant avilir & diffamer le talent des Comédiens, vous dégoutez les honnêtes gens de l’exercer, & vous vous oppoſez ainſi à ce que cette profeſſion s’annobliſſe & ſe purifie des abus qu’on peut encore lui reprocher. Un Cenſeur ſage, honnête homme & vraiment zelé ne répand point le fiel & l’infamie ſur ceux dont les mœurs le choquent, il leur montre le chemin de la Vertu & s’en tient là : mais quelle opinion n’eſt il pas parmi d’avoir d’un homme qui quitte le Paradis terreſtre : (car la magnifique deſcription que vous faites de Genêve en donne cette idée) quelle opinion, dis je, n’eſt il pas permi d’avoir d’un petit Auteur qui quitte un ſejour ſi délicieux, pour venir inſulter une nation reſpectable, blâmer tous ſes uſages & ſes goûts, lancer des traits critiques ſur ſon Gouvernement, prêcher l’indépendance, & vanter le bonheur des Iroquois & des Caraïbes, c’eſt-à-dire l’orgueil, la férocité, la révolte, la cruauté à un Peuple accoutumé à chérir ſes Rois, & qui ſe diſtingue par ſa docilité, par ſon zele & ſon reſpect pour les loix ; Que penſer d’un petit Docteur