ſûrement pas ce qu’il y a d’odieux dans le caractere qui fait rire, mais c’eſt le comique des ſituations dans lesquelles les perſonnages ſe trouvent.
Demandez à nos Juges criminels s’ils ne condamnent pas ſouvent au ſupplice des coquins qui l’ont mérité de la façon la plus comique ; quoique ceux ci ayent pû déconcerter la gravité de leurs Juges dans leur interrogatoire, par ce qui s’eſt trouvé de plaiſant dans les circonſtances du délit : ce comique là disparoit dès qu’il eſt queſtion de prononcer, & la ſentence n’en eſt pas moins ſérieuſe quoi que le procès ſoit riſible. Tel eſt le Public à l’égard d’Angelique, quoique la malice & la préſence d’esprit de celle-ci le faſſent rire aux dépens de George Dandin, qui d’ailleurs mérite tous les chagrins qu’il éprouve.
En qualité de Juge, il reprend très fort ſon ſérieux, quand il eſt queſtion de prononcer ſur le Compte d’Angelique : il ne voit plus en elle qu’une femme déteſtable ; il paſſe du rire à la compaſſion pour le pauvre George Dandin, & convient avec lui que quand on a épouſé une auſſi méchante femme que la ſienne, le meilleur parti que l’on puiſſe prendre, eſt d’aller ſe jetter dans l’eau la tête la premiere. C’eſt alors qu’Angelique n’eſt plus aux yeux du Public qu’une femme exécrable, & :que le reproche que l’on fait univerſellement à Moliére d’avoir laiſſé triompher le Vice eſt ſans doute l’éloge qu’il deſiroit pour ſa piéce. En effet conſultez vous vous même. Êtes vous jamais