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Chapitre IV : De l'état de siège

Article 101 Dans les places en état de siège, l'autorité dont les magistrats étaient revêtus pour le maintien de l'ordre et de la police passe, tout entière au commandant d'armes, qui l'exerce, ou leur en délègue telle partie qu'il juge convenable.

Article 102 Le gouverneur ou commandant exerce cette autorité ou la fait exercer en son nom et sous sa surveillance, dans les limites que le décret détermine ; et, si la place est bloquée, dans le rayon de l'investissement.

Article 103 Pour tous les délits dont le gouverneur ou le commandant n'a pas jugé à propos de laisser la connaissance aux tribunaux ordinaires, les fonctions d'officier de police judiciaire sont remplies par un prévôt militaire, choisi, autant que possible, parmi les officiers de gendarmerie ; et les tribunaux ordinaires sont remplacés par les tribunaux militaires.

Article 104 Dans l'état de siège, le gouverneur ou commandant détermine le service des troupes, de la garde nationale, et celui de toutes les autorités civiles et militaires, sans autre règle que ses instructions secrètes, les mouvements de l'ennemi et les travaux de l'assiégeant.

Article 105 Le gouverneur ou commandant consulte les commandants des troupes, de l'artillerie et du génie ; l'inspecteur aux revues et le commissaire des guerres, seuls ou réunis en conseil de défense. Dans ce dernier cas, le secrétaire-archiviste tient la plume, et constate, dans le registre des délibérations du conseil, l'avis commun ou- les opinions respectives de ses membres, qui peuvent y consigner, sous leur signature, tous les développements qu'ils jugent à propos d'ajouter au procès-verbal. Mais le gouverneur ou commandant décide seul, et contre les avis du conseil ou de ses membres, lesquels restent secrets. Faisons au conseil et à ses membres défense expresse de laisser transpirer aucun objet de délibération ou leur opinion personnelle sur la situation de la place.

Article 106 Indépendamment du registre des délibérations du conseil de défense, il sera tenu particulièrement par le gouverneur ou commandant de la place, par les commandants de l'artillerie et du génie, et par les chefs des divers services, un journal sur lequel seront transcrits; par ordre de dates, et sans aucun blanc ni interligne, les ordres donnés et reçus, la manière dont ils ont été exécutés, leur résultat, et toutes les circonstances, toutes les observations qui peuvent éclairer sur la marche de la défense. Notre ministre de la guerre déterminera, dans une instruction spéciale, la manière dont ces journaux doivent être tenus, et les formalités nécessaires afin qu'ils aient, ainsi que le registre du conseil de défense, la régularité et l'authenticité nécessaires pour servir à l'enquête prescrite ci-après, article 114.

Article 107 Outre ces registres et journaux, il y aura dans le cabinet du gouverneur ou commandant, une carte directrice des environs de la place, un plan directeur de la place, et un plan spécial des fronts d'attaque, sur lesquels le commandant du génie tracera lui-même ou fera tracer en sa présence et successivement : 1° Les positions occupées et les travaux exécutés par l'ennemi, à commencer de l'investissement ; 2° Les travaux de contre-approche ou de défense, et les dispositifs successifs de l'artillerie et des troupes, à mesure des progrès de l'ennemi.

Article 108 Le gouverneur ou commandant défendra successivement ses ouvrages et ses postes extérieurs, sa contrescarpe, ses dehors, son enceinte et ses derniers retranchements. Il ne se contentera pas de déblayer le pied de ses brèches, et de les mettre en état de défense par des abattis, des fougasses, des feux allumés, et par tous les moyens usités dans les sièges; mais, en outre, il commencera de bonne heure, en arrière des bastions ou des fronts d'attaque, les retranchements nécessaires pour soutenir au corps de place un ou plusieurs assauts. Il y emploiera les habitants. Il y fera servir les édifices, les maisons, et les matériaux de celles que les bombes auront ruinées.

Article 109 Mais, dans ces défenses successives, le gouverneur ménagera sa garnison, les munitions de guerre et ses subsistances, de manière : 1° Qu'il ait, pour les assauts et la reprise de ses dehors, et spécialement pour l'assaut au corps de place, une réserve de troupes fraîches et choisies parmi les vieux corps et les vieux soldats de sa garnison ; 2° Qu'il lui reste les munitions et les subsistances nécessaires pour soutenir vigoureusement les dernières attaques.

Article 110 Tout gouverneur ou commandant à qui nous avons confié l'une de nos places de guerre doit se ressouvenir qu'il tient dans ses mains un des boulevards de notre empire, ou l'un des points d'appui de nos armées, et que sa reddition avancée ou retardée d'un seul jour peut être de la plus grande conséquence pour la défense de l'État et le salut de l'armée. En conséquence, il sera sourd à tous les bruits répandus par l'ennemi, ou aux nouvelles directes et indirectes qu'il lui ferait parvenir, lors même qu'il voudrait lui persuader que les armées sont battues et la France envahie ; il résistera à ses insinuations comme à ses attaques : il ne laissera point ébranler son courage ni celui de la garnison.

Article 111 Il se rappellera que les lois militaires condamnent à la peine capitale tout gouverneur ou commandant qui livre sa place sans avoir forcé l'assiégeant de passer par les travaux lents et successifs des sièges, et avant d'avoir repoussé au moins un assaut au corps de place sur des brèches praticables.

Article 112 Lorsque notre gouverneur ou commandant jugera que le dernier terme de sa défense est arrivé, il consultera le conseil de défense sur les moyens qui restent de prolonger le siège. Le présent paragraphe y sera lu d'abord à haute et intelligible voix. L'avis du conseil ou les opinions de ses membres seront consignés sur le registre des délibérations ; Mais le gouverneur ou commandant seul prononcera, et suivra le conseil le plus ferme et le plus courageux, s'il n'est absolument impraticable. Dans tous les cas, il décidera seul de l'époque, du mode et des termes de la capitulation. Jusque-là, sa règle constante doit être de n'avoir avec l'ennemi que le moins de communication possible, et de n'en tolérer aucune. Dans aucun cas, il ne sortira lui-même pour parlementer, et n'en chargera que des officiers dont la constance, la fermeté, le courage d'esprit et le dévouement lui seront personnellement connus.

Article 113 Dans la capitulation, le gouverneur ou commandant ne se séparera jamais de ses officiers ni de ses troupes ; il partagera le sort de sa garnison après comme pendant le siège ; il ne s'occupera que d'améliorer le sort du soldat et des malades et blessés, pour lesquels il stipulera toutes les clauses d'exception et de faveur qu'il lui sera possible d'obtenir.

Article 114 Tout gouverneur ou commandant qui aura perdu une place que nous lui aurons confiée sera tenu de justifier de la validité de ses motifs devant un conseil d'enquête.

Article 115 Si le conseil d'enquête trouve qu'il y a lieu à accusation, le prévenu sera traduit devant le tribunal compétent pour y être jugé conformément aux lois.

Article 116 Si le conseil d'enquête déclare que le gouverneur ou commandant est sans reproche, et qu'il a prolongé sa défense par tous les moyens en son pouvoir jusqu'à la dernière extrémité, il sera acquitté honorablement, et le jugement du conseil publié sur-le-champ et mis à l'ordre de l'armée et des places.

Article 117 Tout gouverneur et commandant qui, d'après la déclaration des conseils d'enquête, et d'après les comptes particuliers qui nous en seront parvenus, aura défendu sa place en homme d'honneur, en bon Français et en sujet fidèle, nous sera présenté par notre ministre de la guerre, dans un jour de grande parade avec les chefs de corps et de service, et les militaires qui se seront le plus signalés dans la défense; nous réservant de leur donner nous-mêmes, et en présence des troupes, les témoignages publics et les marques de notre satisfaction. À cet effet, notre ministre de la guerre bâtera l'échange de ceux qui seraient prisonniers, et qui seront, à leur retour, rappelés de leur solde d'activité sans aucune retenue.

Article 118 Tout gouverneur tué sur la brèche, ou mort de ses blessures après une défense honorable, sera inhumé avec les mêmes honneurs que les grands-officiers de la Légion d'Honneur ; son traitement de retraite sera réversible sur sa famille, et ses enfants obtiendront les premières places vacantes dans les institutions publiques. Nous nous réservons de pensionner et de placer dans les mêmes institutions les enfants des militaires tués ou morts de leurs blessures dans la défense des places.

Article 119 Les batteries, dehors et ouvrages extérieurs des fronts d'attaque de nu places de terre recevront, à l'avenir, les amis des généraux, commandants et autres militaires qui se seront illustrés dans la défense des places.

Article 120 Dans les places de guerre qui sont en même temps ports de notre marine impériale, il n'est rien changé aux lois et usages qui règlent le service des états-majors des places, dans sus rapports avec le service de la marine. Notre ministre de la guerre nous proposera, de concert avec notre ministre de la marine, les changements qu'il serait nécessaire de faire à cette partie de la législation, pour la mettre en harmonie avec les dispositions du présent décret.




1er mal 1812. — Décret qui détermine les cas dans lesquels il est permisà un commandantde place de capituler. —

V. Organisationmili-

taire.

22 déc 1812.

Décret relatif au mode d’exécution du décret du 25 mars 1811 ci-dessus. —V . Organisation militaire. 31 janv. 1813.

Décret relatif aux travaux d’entretien et de réparation des ponts dormants et des ponts-levis établis sur

des routes qui

traversent des fortifications. —V. Trav. publ. 47 déc. 1833.

Décret relatif à l’organisation des cohortes pour la garde des places de guerre à l’égard desquelles il n’y aurait pas été pourvu, et pour le maintien de la tranquillité, etc. 13-18 avril 1814.

Arrêté du gouvernement provisoire qui ordonne la réduction des approvisionnements et travaux extraordinaires prescrits pour la défense des places de guerre. 24 déc. 1819-9 janv. 1818.

Ordonnance du roi relative à

l’entretien et réparation des bâtiments, clôtures et autres constructions situés autour des places de guerre au delà de la distance y déterminée. Louis, etc. ;—La loi du 10 juill. 1791, tit. 1, art. 29 et 30, confirmant en ce point les ordonnances de nos prédécesseurs,avait fixé à 1,000 mètres, comptes de la crête des chemins couverts les plus avancés,la distance à laquelle il était défendu de faire, autour des places de guerre de première classe, des levées en terre ou fossés ; et à 500 mèlres, la distance à laquelle il était défendu de construire ou réparer sans permission les bâtiments et clôtures.

Un décret réglementaire du 9 déc. 1811, assimilant aux levées et fossés les bâtiments et clôtures, a porté à la distance de 1,000 mètres la limite en deçà de laquelle il est défendu d’élever ou de réparerlesdites constructions. —

Un autre règlementdu 14 déc. 1811, en

rappelant cette disposition, a fait d’autres modificationsà la loi du 10 juill. 1791.

Plusieurs propriétaires de bâtiments, clôtures ou terrains situés entre les deux limites de 1,000 et de 500 mètres, ont réclamé contre lesdits règlements, principalement en ce qui concerne la défense de réparer les bâtimentset clôtures existant avant leur publication. D’autres ont demandé à bâtir entre ces limites sur les terrains nus qu’ils y possèdent. Quelques-unsenfin ont demandé qu’on levât les restrictions même appor-