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l’étude de la langue chinoise. C’est de là qu’après la mort de Mgr Bruguière, il partit pour se présenter à la frontière de la Corée.

Au moment de se mettre en route, il écrivait aux directeurs du séminaire de Paris les lignes suivantes, qui feront connaître le fond de son cœur : « Mon entrée en Corée a été, je vous l’avoue, la matière d’une méditation bien inquiétante pour moi, car je connais assez mon incapacité à remplir la difficile fonction d’administrer une mission ; je tremble en y pensant, surtout en pensant au compte qu’il en faudra rendre à Dieu. Mais enfin, messieurs et très-chers confrères, j’ai toujours cru que je ne pouvais, sans crime, manquer l’occasion d’aller là où je crois que le Seigneur m’appelle. Si Jésus-Christ, qui, je le crois, nous envoie maintenant par votre ministère, avait voulu employer des hommes de science et de talents reconnus, pour publier le saint Évangile, il n’aurait pas manqué d’adjoindre au grand apôtre, Gamaliel et Nathanaël. Saint Augustin, cependant, nous dit qu’ils n’ont pas été admis à l’apostolat, parce qu’ils étaient docteurs de la loi. Avant de quitter la France, et bien des fois depuis, je me suis fait cette double question : es-tu digne ? es-tu capable de remplir des fonctions si relevées et si difficiles ? Il me semble, néanmoins, que j’ai obéi à la voix du bon Dieu, quoique j’aie reconnu toujours mon indignité et mon incapacité. Que faire encore dans cette difficile circonstance, où les mêmes pensées se présentent ? Comme par le passé, je crois qu’il faut marcher là où l’obéissance appelle, reconnaître la volonté de Dieu dans les circonstances diverses qui se présentent, et s’abandonner au secours et à l’assistance de la divine miséricorde. C’est dans ces sentiments, messieurs et très-chers confrères, que je pars lundi de Sivang, par la route qu’avait prise feu mon très-cher seigneur de Capse, pour me présenter à Pien-men, au temps marqué par les Coréens.

« Je prie chacun de vous en particulier de célébrer, pour votre serviteur et pour la mission de Corée, six messes votives : la première de la très-sainte Trinité, pour obtenir qu’elle seule soit adorée en Corée, et que le culte idolâtrique, et tout autre contraire à la foi catholique, y soit anéanti ; la seconde du Saint-Esprit, afin qu’il daigne éclairer et animer de plus en plus les esprits et les cœurs des missionnaires et des chrétiens de Corée, faire connaître et embrasser la foi catholique à ceux qui ne la connaissent pas ; la troisième de la Passion, pour que Jésus-Christ daigne nous apprendre à souffrir, à son exemple, avec