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l’œuvre, instruisant les chrétiens, administrant les sacrements aux néophytes, baptisant les païens, multipliant les livres de religion, constamment sur la brèche pour réparer les maux causés par une persécution permanente, se faisant tout à tous, pour les gagner tous à Jésus-Christ. Les comptes rendus annuels nous ont montré de quels succès Dieu avait daigné couronner leurs efforts. Le nombre des âmes sauvées, des infidèles convertis, des enfants païens baptisés en danger de mort, allait sans cesse en augmentant. L’Évangile, de mieux en mieux connu dans tout le pays, élargissait chaque jour ses conquêtes ; il venait de pénétrer dans les dernières provinces jusque-là fermées à son influence, et tout annonçait un prochain et éclatant triomphe de la vérité sur l’erreur, de Jésus-Christ sur Satan, lorsque Dieu, dont les voies sont impénétrables, a permis à l’enfer de tenter un suprême effort. L’Église de Corée a été noyée dans le sang de ses pasteurs et de ses fidèles.

Mais elle sortira du tombeau que ses ennemis croient avoir scellé pour jamais. Jésus-Christ toujours crucifié dans les siens, ressuscite toujours. De nouveaux missionnaires ont été envoyés pour remplacer les martyrs. Ils travaillent maintenant dans le Léao-tong, province de la Mandchourie qui confine à la Corée, et se préparent à profiter de la première occasion pour pénétrer dans leur mission désolée. À M. Ridel est échu le glorieux héritage de MMgrs Berneux et Daveluy. Nommé, par le Souverain Pontife, évêque de Philippopolis et vicaire apostolique de Corée, il est venu à Rome à l’occasion du Concile œcuménique, et y a reçu la consécration épiscopale, le 5 juin 1870[1]. Sa tâche est difficile. La frontière de Corée est devenue aujourd’hui plus infranchissable que jamais. Vainement, depuis le retour de l’expédition française, on a essayé à plusieurs reprises de s’y introduire. M. Calais en 1867, Mgr Ridel lui-même, en 1869, ont couru les plus grands dangers ; ils ont été forcés de reculer, après avoir salué de loin les montagnes de la terre des martyrs. Le nouvel évêque et ses missionnaires recommenceront ces tentatives, et si leurs efforts échouent, si eux-mêmes succombent à la peine et ne peuvent rentrer en Corée, ils auront des successeurs qui y rentreront, et la croix renversée se relèvera, et l’œuvre de la rédemption

  1. Mgr Ridel est né à Chantenay, diocèse de Nantes, le 7 juillet 1830. Ordonné prêtre au mois de décembre 1857, il exerça dix-huit mois les fonctions de vicaire dans la paroisse de la Remaudière. Le 29 juillet 1859, il entra au Séminaire des Missions Étrangères, et partit pour la Corée, le 25 juillet de l’année suivante.