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il put voir des satellites partir avec les deux chrétiens qu’il envoyait. On ne tint nul compte de ses reproches et de ses réclamations.

Après son entrevue avec Mgr Daveluy et M. Aumaître, M. Huin revenu dans sa chrétienté avait, le jour suivant, continué l’administration et entendu quelques confessions. Il voulait même célébrer la sainte messe, afin de distribuer la communion, mais les chrétiens les plus sages insistèrent pour qu’il se retirât dans un autre village. Pendant la nuit, il vint à No-peu-moi, où un noble chrétien, nommé Paul Sin, lui offrit une retraite. Là aussi se trouvaient des satellites qui, soupçonnant Paul de cacher un Européen, et n’osant pas néanmoins violer le privilège de sa noblesse en pénétrant chez lui de vive force, firent pendant toute la journée un tapage effroyable autour de la maison. Un noble païen, ami de Paul, le tira d’embarras ; il menaça les satellites, glissa quelque argent dans la main de leurs chefs, et obtint enfin leur éloignement. Pendant ce temps, M. Huin avait été obligé de se réfugier dans une petite armoire pratiquée dans le mur, où il pouvait à peine entrer. Il y passa plus d’une heure, replié sur lui-même, et ne respirant qu’avec difficulté. La nuit venue, il gagna un autre village nommé Soi-tjai, distant de deux lieues, et quelques heures après, deux chrétiens, accompagnés de cinq satellites, pénétraient dans sa chambre. C’étaient les messagers de Mgr Daveluy. M. Huin jeta les yeux sur la lettre et leur dit ; « L’évêque a été arrêté ce matin ; il m’invite à aller le rejoindre. Cela suffit. » Les satellites lui firent une foule de questions, et lui demandèrent entre autres, s’il y avait longtemps qu’il n’avait vu les autres prêtres. M. Huin, convaincu que M. Aumaître était déjà arrêté, répondit : « J’ai vu le P. O. — Le P. O. ! » reprirent-ils ; « tiens, il paraît qu’il y en a encore un troisième dans le voisinage. » M. Huin garda le silence. Son domestique, par qui l’on a su tous ces détails, dit alors aux satellites : « L’homme dans la maison duquel nous nous trouvons maintenant n’est pas chrétien. Si nous restons jusqu’au jour, on saura ce qui s’est passé, et il en résultera pour lui un grand dommage. Partons de suite. » Ils y consentirent, et le 12 mars dans la matinée, le missionnaire fut amené près de Mgr Daveluy.

En apprenant l’arrestation du prélat, M. Aumaître comprit qu’il lui était impossible d’échapper longtemps aux recherches qui se faisaient dans tous les villages des alentours, et songea seulement à ne compromettre aucun des chrétiens qui étaient à son service. En conséquence, après s’être bien informé du chemin