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des chrétiens. Nous avons raconté plus haut son arrestation. En allant chez le grand juge, il avait sur les épaules la corde rouge, mais pour la forme seulement, car on ne le lia point, et comme deux soldats tenaient les manches de son habit, le chef des satellites leur dit : « Laissez ce digne vieillard marcher seul et n’ayez nulle crainte qu’il s’échappe, faites-lui seulement escorte, et ne marchons pas trop vite. » Enfermé d’abord au Kou-riou-kan, puis transféré au Keum-pou où il demeura quatre jours, Marc eut à subir les mêmes interrogatoires et les mêmes supplices que nous avons décrits plus haut. On savait qu’il était un des chefs des chrétiens, et l’on employa, à diverses reprises, des tortures extraordinaires pour le forcer à dénoncer ses coreligionnaires ; mais il ne nomma que des personnes déjà mortes, et se contenta de répéter au juge : « Puisqu’à vos yeux la profession du christianisme est un crime digne de mort, j’ai commis ce crime et j’y persiste ; faites-moi mourir. » La sentence prononcée, on le ramena au Kou-riou-kan ; il y demeura jusqu’au 11 mars, et, en ce jour, eut le bonheur d’accompagner au supplice, à Sai-nam-to, MM. Pourthié et Petitnicolas. La tête de Marc ne tomba qu’au quatrième coup de sabre. Elle fut exposée pendant trois jours, suspendue par la barbe, car depuis longtemps Marc était complètement chauve. Sa femme parvint ensuite à racheter ses précieux restes pour les ensevelir honorablement.

Alexis Ou, né au district de Seu-heng dans la province de Hoang-haï, était le troisième enfant d’un lettré célèbre qui, frappé des rares talents de son fils, soigna son éducation d’une manière spéciale. Il avait dix-huit ans, et venait de passer un brillant examen, quand un catéchiste, nommé Jean Kim, lui parla pour la première fois de la religion chrétienne, et alluma dans son cœur un vif désir de l’embrasser. Alexis déclara aussitôt à son père qu’il voulait partir pour la capitale, afin d’y recevoir le baptême, et malgré les larmes, les remontrances et les mauvais traitements, il s’échappa de la maison paternelle et vint, avec quelques autres catéchumènes, se jeter aux pieds de Mgr Berneux. Le saint évêque fut charmé de sa pénétration d’esprit et de ses rares qualités ; mais, prévoyant les tentations terribles auxquelles sa foi allait être soumise de la part de sa famille, il voulut l’éprouver d’abord. Il baptisa tous ses compagnons de voyage et les renvoya dans leur pays, mais il refusa, jusqu’à nouvel ordre, de baptiser Alexis. Celui-ci désolé le supplia, en versant des torrents de larmes, de lui accorder la même grâce, lui promettant qu’avec le secours de Dieu, il resterait ferme dans