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ans, un ambassadeur coréen va à Péking souhaiter la bonne année à l’empereur chinois et lui offrir certains présents déterminés ; enfin, lorsqu’un roi de Corée meurt, un ambassadeur spécial vient de Chine investir son successeur. Ne croyez pas cependant que les Coréens fassent tout ce que veulent les Chinois ; les envoyés de l’empereur eux-mêmes se font, lorsqu’ils arrivent en Corée, aussi humbles et obéissants que possible, et lorsqu’ils entrent dans la capitale de la Corée, ils ne peuvent voir personne, pas même les maisons, car on couvre tout d’une toile sur leur passage, sous prétexte que les Coréens pourraient manquer de respect au représentant du Céleste Empire, en riant de son bizarre costume. Et d’ailleurs, les deux royaumes fussent-ils plus unis qu’ils ne le sont, la Corée fût-elle dépendante de la Chine au point qu’un ordre émané de Péking dût suffire pour nous donner la liberté, croyez-vous que les ministres chinois donneront jamais cet ordre, ou diront là-dessus le moindre mot aux Coréens, s’ils n’y sont forcés par les Européens ? Supposé même que les ambassadeurs européens voulussent traiter cette affaire avec la cour de Péking, celle-ci répondrait bien certainement que la Corée étant un royaume indépendant, un pays qui a son roi et ses lois distinctes, la Chine n’a rien à voir ou à ordonner dans des matières de cette nature. Et, tout naturellement, les consuls européens prendraient ces réponses chinoises comme des vérités de bon aloi, et se déclareraient satisfaits.

« Non, en fait de liberté, je crois que, pour le moment, nous n’avons d’autres démarches à faire qu’auprès du bon Dieu. Il nous faut remettre tout entre ses mains, accepter de bon cœur les difficultés, les périls, les persécutions, comme et quand il plaira à sa divine Majesté, certains qu’elle nous enverra ce qui est le plus selon sa gloire ; que nous faut-il de plus ? D’ailleurs, j’entends dire assez souvent que cette liberté si désirée, si prônée, et dont la concession en Chine a retenti si loin, promulguée qu’elle était par la voix du canon, j’entends, dis-je, souvent répéter qu’elle procure bien des déceptions, et qu’elle n’a fait que changer la nature des difficultés, sans faire avancer la conversion des peuples aussi vite qu’on l’avait espéré. Avec la liberté, entrent les marchands, gens souvent impies et de mœurs scandaleuses, les ministres des diverses sectes, plus dangereux encore. Or, c’est peu de pouvoir dépenser de fortes sommes d’argent à élever de grandes églises en pierre, si une infinité d’âmes destinées à être les temples de l’Esprit-Saint restent toujours sous l’empire du démon ; c’est peu de pouvoir