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épiscopale, sous le titre d’évêque d’Acônes. Nous étions encore tous réunis, et terminions un synode de trois jours, où nous avons pris des mesures pour procurer l’avancement de nos chrétiens et la conversion des idolâtres, quand nous arriva, le 31 mars, d’une manière toute providentielle, et amené par l’ange de la Corée, un confrère que personne n’attendait, M. l’abbé Féron. Ainsi cette mission de Corée, autrefois presque inaccessible aux Européens, qui, il y a deux ans, n’avait pas d’évêque, et pesait tout entière sur deux missionnaires et un prêtre indigène, la voilà maintenant avec deux évêques, quatre apôtres étrangers et un prêtre coréen. N’est-il pas vrai, Messieurs, que le sang des martyrs commence à porter ses fruits, et que le Seigneur paraît avoir sur ce peuple de Corée de grands desseins de miséricorde ? Serait-ce trop se flatter d’espérer que cette chrétienté, qui s’est fondée elle-même, sans le secours d’aucun missionnaire, qui, pendant de longues années, par la seule vivacité de sa foi et l’énergie de son caractère, s’est soutenue, a pu même s’accroître, malgré de sanglantes persécutions ; est-ce trop se flatter, dis-je, d’espérer qu’elle va nous donner d’abondantes moissons, maintenant que le Seigneur lui prodigue tant de secours, dans le zèle intelligent de mon vénéré coadjuteur et des cinq missionnaires qui l’arrosent de leurs sueurs apostoliques ? Il nous semble les voir, ces espérances, commencer déjà à se réaliser. Nous avons encore, sans doute, bien des ennemis dans toutes les classes ; il est cependant incontestable qu’il y a une tendance plus sensible que jamais à se rapprocher de notre sainte religion. Les persécuteurs eux-mêmes le constatent, et des mandarins, comme autrefois cet empereur apostat, avouaient, il y a peu de mois, dans une de leurs réunions, que le Christ triomphait, et que, malgré leurs efforts, avant dix ans, la moitié du royaume aurait embrassé le christianisme. Que diraient-ils s’ils voyaient le fils d’un ministre du roi, mandarin lui-même, nous envoyer des présents, et solliciter, comme une grâce, la permission de nous venir visiter ; s’ils savaient que la femme d’un des oncles du roi a engagé ses frères à se faire catholiques, et que, dans ce même palais où tant de fois on a juré d’exterminer jusqu’au dernier vestige du nom chrétien, le vrai Dieu a ses adorateurs qui n’attendent que des temps plus calmes pour se présenter au baptême ? Ils verraient peut-être, dans ces faits, l’accomplissement des oracles de la sibylle coréenne, qui annoncent que la reine mère doit mourir cette année (au fait elle vient de mourir), que le roi mourra l’an prochain (on le dit atteint d’une maladie récente, qui ne laisse aucun