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seront heureux de la réussite finale de tant de voyages et de tentatives… Il m’est presque impossible de sortir de ma chambre et de mon lit. J’attends la mort et les ordres de Dieu ; toutes les médecines, toutes les consultations de médecins ayant été inutiles, je ne vois aucun moyen de sortir de là, si Dieu n’y met directement la main. Priez pour moi plus que jamais. Quand vous recevrez cette lettre, tout sera probablement décidé ; j’attends avec confiance et résignation tout ce que la Providence ordonnera. L’administration dans ce pays est accablante, et il y a longtemps que je pressentais un pareil dénouement de toutes mes fatigues. La multiplicité des lieux de réunion pour les chrétiens, les marches quotidiennes à travers les montagnes, par les neiges et les glaces, épuisent les forces en peu de temps. Depuis plusieurs années, M. Daveluy paye son tribut : le P. Thomas, quoique indigène, a eu toutes les peines du monde à finir la visite des chrétiens sans tomber malade. Je ferai tous mes efforts pour envoyer quelques élèves à Pinang. Déjà, ce printemps, je les avais envoyés pour profiter de la barque par laquelle devait venir M. Maistre ; Dieu n’a pas permis qu’on la rencontrât… »

À la fin de cette lettre écrite par M. Daveluy, se trouvent ces quelques lignes tracées par l’évêque lui-même d’une main mal assurée : « Supposez que la maladie vienne à guérir, me laissant privé de l’usage de mes jambes, comme je suis maintenant, il serait à propos de demander à Rome la permission de dire la messe sur une table et assis, pour la consécration des saintes huiles et celle d’un coadjuteur, sans quoi ce serait impossible. Je suis un cadavre plutôt qu’un être vivant ; je suis complètement paralytique. »

Il fallut cependant que les missionnaires se séparassent de leur cher malade. M. Maistre alla faire l’administration des chrétiens dans un district éloigné, et M. Daveluy demeura dans les environs de la capitale, pour être plus à portée de recevoir les ordres de son évêque et d’accourir au premier signal. À la fête de Noël de mauvaises nouvelles arrivèrent, l’état de Mgr Ferréol était plus grave. M. Daveluy voulut se mettre en route pour la capitale, mais l’évêque, songeant plutôt à ses chers chrétiens qu’à lui-même, lui fit dire de venir sans se presser, en faisant la visite des villages qui se trouvaient sur sa route.

Le missionnaire revint plusieurs fois à la charge, demandant la permission de faire de suite le voyage de Séoul, mais il recevait toujours la même réponse : « Le danger n’est pas imminent, il vaut mieux achever d’abord l’administration des chrétiens. »