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où la persécution les réduit, témoins des incarcérations et des supplices qui les punissent comme des malfaiteurs, les idolâtres les mieux disposés ne peuvent s’empêcher de reculer. Mais qu’un rayon de liberté descende sur nos pauvres proscrits, combien d’âmes, timides et hésitantes encore, s’ouvriront à la lumière du saint Évangile ! »

Nous pourrions citer bien d’autres faits analogues, ceux-là suffisent pour faire comprendre quelles espérances la Corée donne aux apôtres de Jésus-Christ. Mais ce n’était pas seulement la liberté qui manquait, c’étaient les ouvriers. Combien ardentes devaient être les prières des missionnaires pour obtenir des secours, à ce moment surtout où ils allaient perdre leur premier pasteur ! Dieu les exauça enfin, il récompensa le zèle persévérant de M. Maistre, et accorda à l’évêque mourant la consolation de serrer sur son cœur ce confrère si longtemps attendu. Voici, d’après une lettre de M. Franclet, missionnaire de Mandchourie, à M. Barran, supérieur du séminaire des Missions-Étrangères, comment eut lieu cet heureux événement. Cette lettre est datée de Chang-haï, 13 septembre 1852.

« … M. Maistre, après sa dernière et infructueuse tentative du printemps, se retrouvait seul, car son compagnon, M. Jansou, avait dû regagner la procure de Hong-kong. Des deux chrétiens amenés par M. de Montigny, il ne lui restait plus pour guide que le plus âgé et le moins habile. On n’avait pas eu de nouvelles du plus jeune depuis qu’il était entré en Corée, promettant de revenir chercher les missionnaires, s’il n’était pas découvert et mis à mort. De cette situation fort peu satisfaisante, notre zélé confrère voulut tirer le meilleur parti possible : il forma l’audacieux projet de se faire jeter sur la côte avec son guide, et d’attendre du ciel le succès de son généreux dessein. La demeure du néophyte n’était qu’à une petite journée du rivage, puisqu’il avait pu autrefois, du haut de la montagne voisine, apercevoir les tentes que le commandant Lapierre, après son naufrage, avait fait dresser sur la petite île de Ko-koun-to. Il fut donc résolu qu’on tâcherait d’aborder à cette île, appelée aussi depuis : l’Île du Camp.

« Le plan était facile à concevoir, mais pour l’exécuter les difficultés étaient grandes ; car il ne suffisait pas de se procurer une barque chinoise quelconque, il fallait surtout, dans ces parages inconnus, un habile et intrépide pilote qui pût la conduire. Pour celui-ci, il n’y avait pas d’autre espoir d’en trouver que sur les deux navires de guerre français qui stationnaient, en