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les officiers français, et l’on fit voile le 28 juillet, vers le golfe de Pe-tché-ly, en longeant la côte occidentale de la Corée.

Le 10 août, les deux bâtiments s’avançaient de concert, au milieu d’un groupe d’îles, dans des parages où les Anglais avaient trouvé de soixante-douze à quatre-vingt-quatre pieds d’eau. On était par 35° 45′ de latitude nord, et 124° 8′ de longitude est. Rien n’annonçait la présence d’un danger, lorsque tout à coup les deux navires touchèrent à la fois. En vain prit-on immédiatement toutes les mesures possibles pour les remettre à flot ; on était malheureusement sur un banc de sable, la brise était fraîche, et pour comble de malheur, la marée achevait de monter. Lorsqu’elle descendit, le corps des bâtiments se trouva presque tout entier hors de l’eau. Il fallut attendre une nouvelle marée ; mais quand le flot revint, les navires s’étaient enfoncés dans le sable, des voies d’eau se déclarèrent de toutes parts, et tout espoir de sauver la Gloire et la Victorieuse fut perdu.

Le 11, la brise tomba un peu, et on put employer la journée à retirer les provisions, les armes et les munitions. Dans la journée du 12, les marins français, au nombre de six cents, opérèrent leur débarquement sur une île voisine du lieu du naufrage ; et le 13 au soir, les deux commandants quittèrent les derniers leurs navires. On n’eut à déplorer que la perte de deux matelots de la Victorieuse, qui se noyèrent en allant porter au large une ancre destinée à relever la corvette.

L’île sur laquelle les Français débarquèrent se nommait Kokoun-to, ou Ko-koun-san[1]. Les équipages s’y établirent sous des tentes, en attendant le retour de la chaloupe de la Gloire, qu’on expédia à Chang-haï, à cent cinquante lieues environ, pour trouver des moyens de sauvetage. L’île fournissait de l’eau, et les naufragés avaient des vivres pour deux mois au moins. On travailla activement à sauver les débris des navires, mais, en quelques jours, la mer avait tout emporté. Les Coréens habitants de l’île se montraient bienveillants pour les naufragés, néanmoins ils craignaient d’avoir des relations avec eux. Bientôt arriva un mandarin de la cour ; il permit de vendre des provisions aux Français, et offrit, au nom du gouvernement coréen, de fournir des barques pour les reconduire en Chine. Cet envoyé n’était porteur d’aucune lettre en réponse à celle du commandant Cécile.

Dans toutes les conférences des Français avec les Coréens,

  1. Ces deux mots sont ici synonymes, car to signifie : île, et san : montagne.