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sans doute, mais ils ne sont pas aussi extrêmes que ceux des malheureux Coréens. Si la charité impose aux hommes la stricte obligation de prendre même sur leur nécessaire, pour aider l’infortuné qui ne pourrait point sans ce secours prolonger sa malheureuse existence, cette obligation ne devient-elle pas tout autrement rigoureuse quand il s’agit de tendre une main secourable à tant de fervents néophytes qui ont si bien mérité de la religion, à tant de milliers de chrétiens encore faibles dans la foi, et environnés de tous les genres de séduction ? Ces infortunés, placés à l’autre extrémité du globe, élèvent depuis plusieurs années leurs mains suppliantes vers le Père commun des fidèles pour implorer son secours. Celui qui a la sollicitude de toutes les Églises nous fait l’honneur de choisir notre Société ; par deux fois il a appelé à notre charité et vous croyez devoir attendre encore ! La Corée, dira-t-on, n’est pas au nombre de nos missions, nous n’en sommes point chargés ; j’en conviens, mais on conviendra aussi qu’un père charitable se fait un devoir de retrancher quelque chose du repas frugal destiné à ses enfants pour secourir le malheureux étranger qui est près d’expirer à ses pieds. Un ou deux prêtres de moins dans la totalité de nos missions ne font point un vide sensible, mais ces deux prêtres seront un bienfait inestimable pour une mission entièrement abandonnée. Quelque intérêt que je porte à la mission de Siam, je verrais sans peine qu’on en retirât un missionnaire pour l’envoyer dans cette chrétienté désolée.

« 4o La difficulté de pénétrer dans ce pays. — C’est, je l’avoue, ce que l’on peut opposer de plus plausible ; mais après tout, un projet, pour être difficile, n’est pas pour cela impossible et les enfants du siècle ne sont jamais rebutés par les difficultés, quand il s’agit de leurs intérêts. N’y aurait-il donc que les enfants de lumière qui se montreraient timides et réservés quand il y va de la gloire de Dieu et du salut du prochain ?

« Un prêtre, parti de Péking et Chinois de nation, est entré en Corée, y a exercé le saint ministère pendant plusieurs années quoique la persécution fût très-violente, et a couronné ses travaux par un glorieux martyre, et un prêtre européen, rendu au Su-tchuen ou au Chan-si, ne pourra pas en faire autant ! Les Coréens ont pu faire parvenir en peu d’années plusieurs lettres jusqu’à Rome, et ils ne pourront pas introduire un prêtre chez eux ! Je prévois la réponse que vous allez faire ; c’est par Péking que les lettres passent, c’est le seul point de communication ; eh bien ! on fait avertir les chrétiens coréens en adressant les lettres