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CHAPITRE III.

Nombreux martyrs à la capitale et dans les provinces.


Dès le lendemain de l’exécution des trois missionnaires, on se hâta de mettre à mort Paul Tieng et Augustin Niou, dont le dévouement, les efforts et les voyages continuels avaient fini par procurer des pasteurs à l’église de Corée, et avaient tant contribué au bien de la chrétienté. En allant au supplice, Paul avait le visage souriant ; Augustin absorbé dans la contemplation semblait déjà mort aux choses de ce monde. Ils furent décapités ensemble, le 15 de la huitième lune, en dehors de la petite porte de l’Ouest. Paul avait quarante-cinq ans et Augustin quarante-neuf. Quoique païenne, la famille d’Augustin fut mise hors la loi, et plusieurs de ses parents dégradés. Sa femme et sa fille païennes, son fils âgé d’environ vingt ans, son frère aîné païen, furent tous exilés dans les îles du Sud. Depuis, on n’en a jamais eu de nouvelles. En 1858, un bruit a couru que le fils du frère aîné d’Augustin venait d’être réhabilité.

Quatre jours après, Charles Tsio suivait au ciel ses deux amis. Apprenant que le jour de sa mort était fixé, il dit à un soldat de la prison : « Je vais au séjour du bonheur : veuillez bien dire de ma part aux personnes de ma famille de ne pas manquer de m’y suivre, » et ce soldat d’un air fort triste alla leur rapporter ces paroles. Charles fut admirable jusqu’à la fin. Il avait enduré onze fois les terribles supplices de la question. Tranquille et gai jusqu’au dernier moment, il riait et plaisantait avec les geôliers ; en se rendant au lieu du supplice, il se mit à chanter des prières, à haute voix, d’un air tout joyeux. Il fut décapité dans la quarante-cinquième année de son âge.

Huit autres confesseurs furent, en ce même lieu et à la même heure, les compagnons de son triomphe. Disons quelques mots de chacun d’eux. Sébastien Nam, de race noble, avait vu son père, exilé en 1801, mourir peu de mois après. Exilé lui-même, mais jeune encore et peu instruit, il vécut longtemps dans un grand relâchement. Ce ne fut qu’après l’amnistie de 1 832 qu’il se convertit et s’efforça de regagner le temps perdu. Bravant tous les dangers, il alla jusqu’à la ville de Ei-tsiou pour chercher le P. Pacifique, et ensuite accepta la charge de maître de sa maison. Depuis sa con-