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par leur harmonie n’en former qu’une seule. Arrêtée avec lui, elle ne se démentit pas dans les supplices, et fut décapitée à l’âge de cinquante et un ans. Rose Kim Kam-kol-tsip-i, veuve, n’était devenue chrétienne qu’après la mort de son mari. Elle avait converti sa mère et son frère, et vivait avec eux dans la pratique exacte de tous ses devoirs. Prise à la onzième lune de l’année mou-sioul (1838), avec Pierre Rouen, elle invoqua à l’instant les noms de Jésus et de Marie, pour obtenir la force de confesser sa foi jusqu’au martyre. Les supplices qu’elle eut à subir dans les deux tribunaux ne la tirent pas faiblir, et elle cueillit enfin la palme si désirée, après huit mois de prison, étant alors âgée de cinquante-six ans.

Enfin, la dernière victime de cette journée fut la jeune vierge Marie Ouen, âgée de vingt-deux ans. Ayant perdu dès l’enfance son père et sa mère, elle quitta la province et vint chez des parents de la capitale, où elle gagnait sa vie par des travaux d’aiguille. Elle avait fait vœu de garder la virginité et donna toujours l’exemple d’une gravité au-dessus de son âge, jointe à une parfaite égalité d’âme. À la deuxième lune, quand les satellites entrèrent dans sa maison, elle put s’enfuir d’abord, mais des gens qui la connaissaient, l’ayant rencontrée sur la route, la tirent arrêter. Pendant un quart d’heure environ, elle fut toute déconcertée et comme hors d’elle-même. Mais bientôt la pensée que rien n’arrive en ce monde que par la volonté de Dieu lui rendit son calme ordinaire. Dans les deux tribunaux tous les moyens furent mis en œuvre pour obtenir son apostasie. La douceur, les caresses, les promesses ne lui tirent aucune impression, et la violence des tourments la trouva plus inébranlable encore. Mise à la torture presque à chaque séance, elle conservait sa présence d’esprit et répondit toujours avec calme et dignité. Dans la prison, elle eut cruellement à souffrir de la faim et de la soif, et fut prise de la peste courante. Enfin, après cinq mois de détention, elle eut le bonheur de signer de son sang le contrat de ses chastes noces avec l’Agneau de Dieu.

Cependant Mgr Imbert, dans sa retraite, apprenait jour par jour les graves événements qui se succédaient non-seulement à la capitale, mais aussi dans les provinces. La position devenait des plus critiques. Dans cette extrémité, il jugea qu’il fallait appeler ses deux missionnaires pour conférer avec eux. Les routes étaient devenues fort dangereuses, mais André Son, le généreux hôte de Sa Grandeur, se chargea de les amener dans son bateau. Le 24 juillet, à minuit, il revint avec M. Chastan ; puis il repartit