Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 2.djvu/15

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La Sacrée Congrégation écrivit donc, en date du 1er septembre 1827, aux directeurs du séminaire des Missions-Étrangères pour leur demander s’ils pourraient pourvoir promptement, et d’une manière stable, aux besoins de l’Église coréenne, en se chargeant d’y envoyer désormais des missionnaires. Cette lettre mit les directeurs du séminaire dans une grande perplexité. Anciens missionnaires eux-mêmes, ils comprenaient mieux que personne l’état déplorable de cette pauvre mission depuis si longtemps délaissée, et leur zèle les poussait à accepter immédiatement la proposition. D’un autre côté, à un moment où les vocations étaient encore si peu nombreuses, les ressources si peu considérables, la prudence ne leur faisait-elle pas un strict devoir de ne point se charger de missions nouvelles, quand ils pouvaient à peine suffire aux besoins des anciennes ? N’est-ce pas Notre-Seigneur lui-même qui a dit : Volens turrim œdificare prius sedens computat sumptus qui necessarii sunt, si habeat ad perficiendum (Luc, xiv, 28) : Celui qui veut construire un édifice, calcule d’abord soigneusement les frais, pour voir s’il a de quoi mener l’œuvre à bonne fin ?

En conséquence, sans accepter ni refuser positivement, ils exposèrent à la Sacrée Congrégation leurs doutes et leurs difficultés. Pour le moment ils avaient bien peu de sujets, et ils pouvaient craindre, en se chargeant de la Corée, d’entreprendre une œuvre au-dessus de leurs forces. Les revenus du séminaire, les aumônes de l’association naissante de la Propagation de la foi, ne donnaient que des sommes insuffisantes pour les missions anciennes ; en entreprendre d’autres en pareil cas, ne serait-ce pas tenter Dieu ? De plus, par quelle voie pénétrer en Corée ? comment conserver des relations avec ce pays ? puisque les seules missions que la Société avait alors en Chine étaient à l’ouest de l’empire, dans la partie la plus éloignée de la Corée, et que d’un autre côté, les Coréens n’ayant aucun commerce par mer avec les autres nations, il fallait nécessairement, pour arriver chez eux, traverser toute la Chine et une grande partie de la Tartarie. Presque tous les missionnaires européens de Péking venaient d’être obligés de quitter cette capitale, et de se retirer à Macao ; n’était-il pas nécessaire que la Sacrée Congrégation écrivît d’abord à son procureur en Chine, pour savoir si, dans un pareil moment, il était humainement possible de faire pénétrer des Européens jusqu’en Corée ? Enfin, dans le cas où la Sacrée Congrégation ne trouverait pas ces motifs suffisants pour autoriser leur hésitation, les directeurs déclaraient qu’ils étaient tous prêts à obéir, mais