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fréquentaient auparavant obéirent à cette injonction du mandarin, mais une grande quantité d’élèves qu’il instruisait dans les lettres chinoises, et qui lui étaient très-attachés, ne firent aucun cas de la consigne. Sous les yeux des gardes, ils escaladaient les murs et les haies pour se rendre à ses leçons, et ils étaient si nombreux et si résolus, que le mandarin crut plus sage de fermer les yeux sur leur conduite.

Pendant trente ans d’exil, Justin supporta avec une patience et une résignation admirables les misères et les épreuves de sa position. Il était heureux de souffrir pour Jésus-Christ, et le Sauveur, acceptant son sacrifice, lui accorda la grâce d’une sainte mort, le 14 de la sixième lune de l’année kieng-in (2 août 1830). Justin Tsio avait alors quatre-vingt-douze ans. Dans les années qui suivirent, quelques-uns de ses disciples vinrent plusieurs fois à 1,500 ou 1,600 lys (150 ou 160 lieues) de distance, dans des pays inconnus pour eux, cherchant à se mettre en rapport avec les fidèles, à compléter l’éducation religieuse qu’ils avaient reçue de Justin, et à entrer dans le sein de l’Église. Malheureusement, la crainte de se compromettre empêcha ceux auxquels ils s’adressaient de se déclarer chrétiens, et ces pauvres gens furent obligés de retourner dans leur pays, sans avoir reçu le baptême. On n’en a plus entendu parler depuis, car les chrétiens n’ont aucun rapport avec cette province éloignée. Toutefois, nous ne pouvons croire que ces hommes courageux, qui ont fait des démarches si extraordinaires pour trouver le salut, aient été entièrement abandonnés. C’est Dieu qui a dit : « Celui qui demande obtient, celui qui cherche trouve, on ouvre à celui qui frappe ; » et notre Dieu est fidèle à ses promesses.


En cette même année 1830, au nord de la province de Kieng-siang, la grâce de Dieu opérait des prodiges dans la personne d’un jeune homme nommé Kim Ho-ien-i. Descendant d’une famille du district de An-tong, célèbre par la rare vertu d’un de ses ancêtres, il était lui-même d’un caractère bon, doux, simple et réfléchi. Dès l’enfance, il parlait peu et ne se mêlait guère aux jeux et aux amusements de ses compagnons. Quelques-uns pensèrent d’abord que c’était chez lui idiotisme, mais ils furent bientôt détrompés. Avant l’âge de vingt ans, Ho-ien-i avait acquis une connaissance exacte de la plupart des livres sacrés du pays ; il était versé dans toute espèce de sciences, dans la morale, la philosophie, les mathématiques, l’astronomie, les arts magiques, les doctrines les plus abstruses de Fô et de