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tasie. Mais comme il avait le cœur vraiment droit, sa chute ne fut pour lui qu’une occasion de redoubler de ferveur. Touché de repentir, il se remit avec plus d’exactitude à la pratique de ses devoirs, et rencontrant dans son pays beaucoup d’obstacles au service de Dieu, il abandonna ses biens et ses proches, et se retira dans les montagnes. Là, cachant son origine, il se fit passer pour un homme de la classe moyenne, et délivré de toutes les inquiétudes du siècle ne songea plus qu’au salut de son âme. Le P. Tsiou étant entré en Corée, il eut le bonheur de recevoir le baptême de sa main, et fut, depuis ce jour, un homme nouveau. Il recherchait les lieux retirés pour pouvoir se livrer, à heures fixes, aux exercices de la prière et de la méditation, et employait le reste de son temps soit à s’instruire lui-même par des lectures pieuses, soit à expliquer aux autres les vérités de la religion. Tout le monde disait de lui : « Voilà un homme vraiment dépouillé de lui-même ; » et beaucoup le fréquentaient pour entendre ses paroles. Il avait le plus grand soin de l’éducation de ses enfants, leur faisait regarder l’exercice de la prière comme le plus important de tous pour un chrétien, et les exhortait sans cesse à la pratique de la vertu. Ses exemples ajoutaient à l’efficacité de ses conseils.

En 1827, lorsqu’il vit la persécution sévir dans la province de Tsien-la, il s’efforça de consoler les chrétiens, de les rassurer, de leur inculquer la résignation à la volonté de Dieu. « Dans le cœur, disait-il, chacun doit se préparer au martyre : mais pour le corps, la prudence veut que l’on cherche à s’échapper quand cela est possible. » Lui-même ne songeait qu’à se disposer à la mort. Souvent, étant malade, il avait dit à son fils et aux autres personnes de sa maison, pour les rassurer et leur enlever toute inquiétude : « Soyez bien tranquilles, je ne mourrai pas ici en votre présence ; » et nul ne savait le sens de ces paroles. Ce ne fut qu’après l’événement que sa famille les comprit. Paul venait de quitter Ka-ma-ki dans les montagnes du district de Ta-niang, où il habitait depuis neuf ans, et s’était installé depuis quelques semaines seulement avec sa famille, à Meng-ei-moki, district de Siang-tsiou, lorsque le jour de l’Ascension, dernier jour de la quatrième lune, au moment où sa famille et les chrétiens du voisinage faisaient avec lui les prières accoutumées, un traître entra dans sa maison à la tête des satellites, qui saisirent presque tous ceux qui étaient présents. Pendant qu’on les conduisait à la ville, Paul répétait : « Rendons bien grâces à Dieu pour la route que nous faisons aujourd’hui ; » et la joie rayonnait sur son visage. Par là,