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côté, je ne saurais exprimer tous les sentiments par lesquels je suis constamment avec chacun de vous. Je sais bien que vous agissez avec beaucoup de zèle. Laissez-moi pourtant vous dire un mot. Vous savez l’histoire de la vraie religion de Notre Seigneur Jésus-Christ dans notre pays. Après des efforts continués pendant de longues années, on était parvenu, par une disposition spéciale de la Providence, à bâtir une toute petite maison, et à y réunir quelques habitants. Puis, le temps n’étant pas favorable, voici qu’un vent et une pluie violente l’ont presque renversée ; quand j’y songe, ma respiration se coupe, et toutefois j’espère que, par la protection de la bonne Mère, cette maison pourra se conserver ; oui, je l’espère ; priez, priez instamment.

« Vous trouverez chez moi des détails sur tout ce que j’ai pu faire pendant le mois passé. Mais quand, ce mois-ci, arrive quelqu’un de nos jours de réunion, ma douleur redouble, car maintenant je me trouve séparé de vous pour toujours. Du reste, quand je survivrais, il n’y aurait pas pour la confrérie une grande utilité. Néanmoins, je sais bien que quand vous ferez vos réunions, vous ressentirez quelque tristesse et quelque regret, à cause de mon absence. Unissez plutôt vos cœurs et vos forces pour remercier Dieu d’un si grand bienfait. Je pense à chacun de vous en particulier. Il me semble même vous voir. De grâce, tous, faites vos efforts pour conserver la petite maison dont je viens de vous parler, et pour arriver sans faute à la grande Maison de Dieu, où nous nous réjouirons tous ensemble.

« Les deux supérieurs sont-ils en bonne santé ? Les supérieurs de chaque lieu sont-ils aussi bien portants ? Je ne puis déposer toute inquiétude à cause de l’intérêt que je vous porte. Que de peines vous voulez bien vous donner ! Si tout est tranquille à la capitale, veuillez bien veiller à la conservation de la petite maison et de ses habitants si peu nombreux. Travaillez à ce que la religion devienne florissante. J’ai vu ici plus de deux cents chrétiens ; peu ont tenu ferme, presque tous sont tombés ! Par la grâce de Dieu, quelques-uns pensent à reprendre la vie, et je me dis : ceci encore n’est-il pas l’effet de l’intercession des confrères ?

« Charles, mon ami[1], comment se porte votre mère ? Certes notre affection mutuelle était bien loin d’être une amitié ordinaire. Sans vous, jamais personne ne m’aurait parlé de mes défauts ; maintenant que j’y réfléchis, vraiment vous étiez pour moi un trésor. Cher ami, écoutez favorablement ma prière, veuil-

  1. Charles Hien, qui fut martyrisé on 1846.