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« On me ramena à la préfecture lorsque déjà les portes s’ouvraient, et je fus bientôt traduit devant le juge qui dit à haute voix et en colère : « Je voudrais en finir avec cette affaire, mais tu fais des déclarations si confuses que je ne puis voir les choses. » Puis, en quelques mots, il conclut que le fait d’avoir écrit tous ces livres était à ma charge. Quel remède pouvais-je apporter à cela ? Ce n’est pas tout. De nombreuses images et objets religieux, dont plusieurs venaient de pays étrangers, avaient aussi été pris chez des chrétiens, qui, pour se tirer d’embarras, avaient jeté la faute sur moi. Le juge dit : « Tu n’as plus aucun moyen de te justifier. Explique donc d’où viennent ces images et autres objets. — J’ai déclaré la vérité pour les livres. Pour le reste, veuillez bien interroger ceux à qui ces objets appartiennent. — Tous n’accusent que toi. » Ne sachant quel parti prendre, je restai muet. Le juge demanda de nouveau aux chrétiens prisonniers, si tous ces objets venaient de moi, et ils répondirent affirmativement. Je dis alors : « On m’a raconté autrefois qu’après l’année sin-iou (1801) quelqu’un ayant acheté la maison d’une personne exécutée à cette époque, trouva, en la démolissant, de ces objets dans les murailles. Ils auront été partagés et répandus de côté et d’autre. C’est sans doute de là qu’ils sont venus. » Le juge courroucé s’écria : « En allant de ce pas, nous n’arriverons à rien. Il faut d’abord torturer ces chrétiens. »

« On se mit à leur scier les membres avec des cordes, et tous alors de rejeter la faute sur moi, avec plus d’insistance que jamais. Comme je me disposais à parler, le juge me soumit à la même torture, en criant : « Serrez, serrez, il faut en finir. » Les bourreaux ainsi excités n’eurent garde de m’épargner, et cependant, par une grâce particulière de Dieu, je souffris moins qu’auparavant. « Ne feras-tu pas enfin des aveux complets ? me cria le juge. — J’ai tout dit. — Qui a d’abord reçu ces différents objets, et par quelles mains ont-ils ensuite passé ? — Les personnes qui vivaient en 1801 sont presque toutes mortes, et s’il en reste quelques-unes, elles ne sont pas chrétiennes. — Qui les a d’abord reçus ? À qui les a-t-il remis ? — Je l’ignore. Ces objets, comme tous les autres, auront changé de maître soit par la mort, soit par dons ou achats. Qui pourrait jamais savoir par quelles mains tout a passé ? — Dis ce que tu sais. » J’indiquai alors quatre ou cinq noms parmi les chrétiens déjà morts, et j’ajoutai : « Quant au reste, il m’est impossible de rien savoir. — Parmi un si grand nombre, tu n’en connais que quatre ou cinq ; c’est une dérision. » On serra de nouveau mes liens, si fort que je crus mourir. Le