Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 1.djvu/508

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tants de la ville qui les entendaient en étaient tout surpris. Un grand nombre vinrent contempler de leurs propres yeux ce spectacle étrange, et s’en retournèrent stupéfaits. La joie, la tranquillité, la concorde de ces prétendus coupables, poursuivis par la justice humaine, étaient pour ces païens une merveille incompréhensible. Pas une dispute, pas une parole grossière, pas un mot d’impatience. » Est-ce donc là, se disaient-ils, le repaire des criminels ? » La prison se trouvait en effet changée en une école de vertus ; elle présentait le spectacle d’une famille admirablement unie, et réglée dans tous ses actes et toutes ses paroles.

Des prétoriens et satellites se présentèrent souvent pour savoir ce qu’était la religion chrétienne. Ils envoyèrent les plus instruits et les plus habiles d’entre eux, pour entamer des discussions sur les points fondamentaux de la nouvelle doctrine. André, le plus capable des sept prisonniers, acceptait avec joie ces occasions. Il développait à ses antagonistes les principaux articles de la foi, leur exposait la beauté des commandements de Dieu ; puis répondant à leurs questions captieuses, il les suivait article par article, réfutait tous leurs arguments, éclaircissait en détail chaque matière, de telle sorte qu’en se retirant ils se disaient entre eux : « Vraiment, il n’y a pas de lettré, quelque savant qu’il soit, qui puisse lui tenir tête, et sa parole peut être comparée à celle des plus fameux orateurs. » André par le fait n’avait qu’une instruction incomplète, mais accoutumé à discourir avec les chrétiens des choses de la religion, il pouvait facilement mettre à bout, en pareille matière, la faconde de n’importe quel prétorien. D’ailleurs, la grâce le soutenait toujours dans ces controverses qui ne manquaient pas d’une certaine importance, car les rapports des prétoriens circulaient ensuite dans la ville et dans toute la province.

Le traître Tsien-tsi-sou-i, fut aussi incarcéré vers cette époque, pour quelque grave méfait. Le gouverneur avait ordonné de le laisser mourir de faim, mais les prisonniers chrétiens lui sauvèrent la vie, en lui donnant tous les jours une part de leur petite ration. Plus tard, lorsqu’il fut délivré, et jeté presque nu hors de la prison, ils lui donnèrent des habits pour se couvrir, montrant ainsi à tous les païens comment la vraie charité sait se venger.

Le séjour des confesseurs dans la prison servit donc beaucoup à faire connaître la religion dans cette grande ville de Tai-kou, et si les fruits se font attendre, nous avons néanmoins la ferme confiance qu’ils ne laisseront pas de se produire un jour. Il paraît que dans le cours de cette année et de la suivante, on leur fit subir