Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 1.djvu/494

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que le premier coup serait frappé inopinément le jour de Pâques, qui tombait cette année le 22 de la deuxième lune.

Ce jour arrivé, alors que les chrétiens réunis chantaient ensemble à haute voix les prières habituelles, le traître se mit à la tête des satellites, et ils envahirent tout à coup le village de Morai-san, au district de T’sieng-song. Les chrétiens qui ne s’attendaient nullement à la persécution furent étrangement surpris, et, croyant d’abord avoir affaire à des brigands, commencèrent, sous la conduite de Joseph Ko, homme agile et vigoureux, à repousser la force par la force ; mais aussitôt qu’ils surent que ces hommes étaient des satellites envoyés officiellement par le mandarin, toute résistance cessa, et Joseph Ko lui-même, devenu doux comme un agneau, se laissa saisir le premier. Un grand nombre de chrétiens furent pris dans cette expédition, et conduits au tribunal de Kieng-tsiou d’où dépendait leur district. Quelques jours après, d’autres satellites tombèrent à l’improviste sur le village de Merou-san, district de Tsin-po, et firent de nombreux prisonniers, qu’on déposa à la préfecture criminelle d’An-tong.

Ces tristes nouvelles se répandirent bientôt de tous côtés. La terreur se mit parmi les chrétiens, et comme il arrive toujours dans de semblables circonstances, les uns prirent la fuite, et cherchèrent un asile dans d’autres provinces ; les autres n’ayant pas le moyen de fuir, demeuraient dans leurs villages, attendant dans des transes continuelles l’heure de leur arrestation, passant le jour dans les forêts ou sur les montagnes, revenant furtivement chez eux pendant la nuit pour préparer quelque nourriture, et regagnant de suite les retraites des bêtes fauves, moins redoutables à leurs yeux que les satellites des mandarins. De tous côtés, des saisies nombreuses furent faites, et bientôt les prisons regorgèrent de chrétiens.

À Kieng-tsiou, les supplices et la faim amenèrent l’apostasie de beaucoup de néophytes qui furent, en conséquence, relâchés immédiatement. Mais leurs compagnons montrèrent plus de courage, et confessèrent hardiment le nom de Jésus-Christ. La tradition rapporte que sept d’entre eux, consumés par la faim, ou tués par les tortures, expirèrent en prison dans le cours de la troisième lune, avant qu’on eût pu les transférer à un tribunal supérieur. C’étaient : Paul Pak, père de Pak T’sioun-t’sieng-i ; Jean Pak Koan-sie, son cousin germain, lequel, veuf et nouvellement converti, ne fut baptisé que pendant la persécution ; Ko-san Kim Sie-pang, oncle maternel de Paul, ainsi appelé parce qu’il venait du district de Ko-san ; Kim Sa-ir-i de la province de Kieng--