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à l’église de Corée d’importants services. Il était frère cadet de François Pai, martyrisé en 1799. Depuis le jour de sa conversion le grand désir de Mathias avait été de faire à tout prix pénétrer des prêtres en Corée. En conséquence, il s’offrit à faire le périlleux voyage de Péking, y alla en effet plusieurs fois, y reçut les sacrements et, selon toute probabilité, fit partie de la troupe qui introduisit le P. Tsiou. La droiture de Mathias, son dévouement, sa ferveur, lui avaient concilié l’estime générale, et les chrétiens aimaient à suivre ses avis. La persécution ayant éclaté, il se cacha, continuant toujours à exhorter ses frères, à célébrer le courage des martyrs, à publier, comme un exemple et un encouragement, le récit de fleurs souffrances. Lui-même se préparait au combat, en supportant avec joie les peines de la vie, en renonçant à tous les plaisirs, et en vivant avec sa femme dans une continence absolue.

Il fut arrêté, et montra un grand courage dans les tourments. Quatre ou cinq mois de supplices continuels ne purent l’ébranler, et le juge, désespérant de venir à bout de son prisonnier par les voies ordinaires, essaya d’un moyen plus perfide. Il mit en jeu la famille de Mathias, et quelques-uns de ses compagnons de captivité, chrétiens indignes qui avaient renoncé à leur foi. Dieu, qui voulait purifier son martyr de tout levain d’orgueil, permit que, cédant un instant à la voix de la nature et aux obsessions de ses amis, Mathias laissât échapper une parole d’apostasie. On le mit immédiatement en liberté. Mais il avait à peine passé le seuil de la prison, que la foi et la grâce reprirent le dessus ; il rentra sur-le-champ, versant des larmes, poussant des gémissements sur le crime qu’il venait de commettre, et invoquant à haute voix les saints noms de Jésus et de Marie. — « Es-tu fou ? » cria le juge, « il n’y a qu’une minute que tu as renoncé à tout cela. — Oui, » dit Mathias, « j’étais fou de prononcer une telle parole, mais maintenant la raison m’est revenue, et dussé-je mourir, je professe hautement la foi de mon Dieu. » Il fut aussitôt condamné à mort, et étranglé dans la prison. Il avait alors trente-trois ans.

Un chrétien du district de Po-rieng, dont le nom même est inconnu, s’était rendu à la capitale pour acheter des images religieuses. Il fut pris, conduit en prison, et mis à la torture. Comme il persistait, après une longue détention et des supplices répétés, à montrer une fermeté peu commune, il fut condamné à mort. On envoya des satellites qui lui dirent de se passer la corde au cou ; il refusa de le faire lui-même, et fut étranglé par eux. Dieu permit qu’un prisonnier chrétien se trouvât dans la