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peine aujourd’hui si l’on peut compter dix familles qui n’aient pas à souffrir de la faim et du froid. En 1794, quand on reçut le prêtre, on ne put rien préparera l’avance. Ce ne fut qu’après son arrivée qu’on disposa à la hâte les choses les plus nécessaires, et encore d’une manière bien mesquine et bien incomplète. Cela provient en partie sans doute de notre inhabileté et ignorance des affaires, mais la cause en tut aussi dans notre pauvreté ; nos forces ne purent y suffire. Plus tard le nombre des chrétiens ayant augmenté, on fut moins à la gêne, toutefois nous ne pûmes arranger les choses convenablement.

« Après la persécution de cette année, tous sont entièrement ruinés. Ceux-là même qui ont voulu par l’apostasie éviter la mort, sont sortis des prisons nus et spoliés, ne conservant que le souffle de la vie. Notre pauvreté est donc plus grande encore qu’en 1794, et eussions-nous même quelque bon expédient, nous ne pourrions le mettre à exécution. Malgré tous les désastres de la chrétienté, si nous avions quelques ressources, il semble que nous pourrions maintenant essayer quelque chose. Voici pourquoi. Depuis 1795, il y avait deux causes continuelles de persécution : l’une, que le feu roi, soupçonnant et craignant le prêtre, voulait absolument le trouver ; l’autre était la haine qui poussait les No-ron à anéantir les Nam-in. Or, d’un côté, le prêtre ayant été saisi, et, de l’autre côté, les Nam-in, poursuivis par les No-ron, ayant vu périr tous leurs hommes les plus remarquables, on peut désormais espérer un peu de calme. Il est vrai que la loi sur les cinq maisons solidaires l’une de l’autre dure encore, mais elle n’est exécutée que dans les quartiers où se trouvaient les chrétiens ; dans les autres endroits, elle n’existe que de nom, tout y est tranquille, et on peut aller s’y établir.

« Pour ce qui concerne les routes, dans les provinces de Kieng-kei, T’sieng-tsieng et Tsien-la où il y avait beaucoup de chrétiens, et dans celles de Kieng-sang et Kang-ouen où les chrétiens fugitifs se sont retirés depuis quelques années, les voyageurs sont, à chaque instant, soumis à des perquisitions. Mais dans les provinces de Hoang-hai et P’ieng-an, où il n’y avait pas de chrétiens avant la persécution, et où depuis nul n’a cherché refuge, on ne parle de rien, et les soupçons ne sont pas éveillés. À Pien-men même, sur la frontière de la Chine, quoiqu’on exerce encore maintenant une assez rigoureuse surveillance, dans un ou deux ans, tout sera passé, et on pourra risquer quelque tentative. Nous devrons aussi changer notre manière d’agir. Jusqu’ici on s’était surtout efforcé de répandre la religion parmi les païens, et de la