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écrire, je m’arrête ici. Année sin-iou, le 27 de la neuvième lune (3 novembre 1801).

« Votre fille, Niou-hei. »


Augustin Niou ayant été condamné et exécuté comme rebelle, le gouvernement, ainsi qu’il est d’usage en pareil cas, donna presque immédiatement des ordres pour qu’on mît à mort ses deux fils aines par la strangulation. Le 6 de la dixième lune, un mandarin, attaché au tribunal du Keum-pou, était député de la capitale pour exécuter cette sentence, et le 9 de cette même lune (14 novembre), Jean Niou Tsiong-sien-i et son frère Jean Niou Moun-tsiel-i furent étranglés dans la prison de Tsien-tsiou.

En même temps, et probablement par la même sentence, les membres survivants de sa famille étaient condamnés à l’exil. Mathieu et Luthgarde réclamèrent : « Suivant les lois, dirent-ils, les chrétiens doivent être mis à mort ; nous demandons à être exécutés promptement. » Ce zèle fut-il indiscret ? Nous n’osons le penser. Sans doute les lois de l’Église ne permettent pas aux confesseurs de provoquer les juges ; elles portaient même autrefois des peines sévères contre ceux qui agissaient ainsi. Mais nos néophytes prisonniers ignoraient ces sages règlements, et, dans la simplicité de leur foi, ils ne suivirent que l’élan de leur cœur. L’histoire des martyrs de la primitive Église offre plusieurs exemples d’un zèle semblable, inspiré ou du moins approuvé par Dieu lui-même, et que l’Église, toujours éclairée par l’Esprit-Saint, a su discerner des écarts de l’orgueil et de la passion.

Les juges n’eurent d’abord aucun égard à ces réclamations, et nos quatre confesseurs, frustrés dans leurs espérances du martyre, prirent à regret le chemin de l’exil. Mais à peine avaient-ils fait quelques lieues que l’ordre vint de les ramener à la prison, pour être jugés de nouveau. Nous ignorons ce qui motiva ce nouvel ordre ; un point cependant semble hors de doute. Si la première sentence avait été rendue en vertu des dispositions légales contre les enfants des rebelles, il est évident que ce nouveau jugement ne peut avoir eu d’autre cause que leur persistance, comme chrétiens, dans la profession de la religion de Jésus-Christ, et la gloire de leur martyre reste parfaitement intacte.

Laissons Luthgarde nous raconter elle-même ces divers événements, dans une longue lettre, écrite de sa prison à ses deux sœurs, c’est-à-dire à sa propre sœur et à sa belle-sœur, femme de Charles Ni, lequel était alors en prison, à la capitale. Cette lettre