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Corée ; ce jeune homme, âgé de quinze à dix-huit ans, portait alors le nom de Kang-tsiou-to-rieng. (C’est celui que les Lettres édifiantes appellent Ouen-tsiou.) Enfin, la mère de Mathieu et la veuve de Koang-kem-i. Cette nombreuse famille était distinguée entre toutes par sa ferveur et son attachement à la religion ; mais nous devons signaler tout particulièrement l’épouse de Jean, Luthgarde Ni. Voici quelques détails sur cette jeune femme, l’une de nos plus chères martyres et l’une des plus touchantes figures de cette histoire.

Luthgarde Ni naquit à la capitale, d’une des plus illustres familles du pays. Son père se nommait Ni Ioun et sa mère Kouen ; elle-même reçut le nom de Niou-hei. Elle était sœur cadette de Charles Ni, martyrisé cette même année sin-iou, à la douzième lune, et sœur aînée de Paul Ni, que nous verrons, dans la persécution de 1827, suivre les glorieuses traces de son frère et de sa sœur.

Luthgarde avait reçu du ciel en partage un caractère résolu, un cœur aimant et enthousiaste, une intelligence supérieure ; en un mot, elle était douée de toutes les qualités du corps et de l’esprit, qualités qu’une éducation convenable à son rang put facilement développer. Son père mourut pendant qu’elle était encore en bas âge, et probablement sans avoir entendu jamais parler de la religion. Sa mère, plus heureuse, s’instruisit de la foi chrétienne, et consacra sa vie à élever ses enfants dans la piété. Luthgarde répondit fidèlement aux soins de sa vertueuse mère ; toutes ses pensées étaient pour le salut de son âme, tout l’amour de son cœur pour Jésus-Christ, et elle ne sentait aucun désir des grandeurs et des plaisirs que sa haute naissance lui eût facilement procurés. Elle avait environ quatorze ans, quand elle eut occasion de rencontrer le P. Tsiou, qui venait d’entrer en Corée. Les chrétiens d’alors étaient généralement si peu instruits des dogmes de la foi, que Luthgarde sembla d’abord trop jeune pour être admise aux sacrements, mais déjà elle comprenait le prix de ces dons célestes. Elle s’enferma seule dans une chambre pendant quatre jours, uniquement occupée à s’y disposer, et le prêtre l’ayant jugée capable de les recevoir, elle fut au comble de ses vœux. Son unique soin fut dès lors de bien conserver le fruit de la sainte Eucharistie, son unique désir d’orner son âme de toutes les vertus, et bientôt après, jalouse d’attirer sans partage les bonnes grâces de son divin Époux, elle fit résolution de lui consacrer sa virginité. Mais de grandes difficultés s’y opposaient.

En Corée, comme nous l’avons déjà remarqué, c’est, dans tou-