Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 1.djvu/364

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à la ville de Kang-hoa, et celle de Sin, épouse de Tarn, fils dudit coupable In.

« Il appert que la belle-mère et la belle-fille sont toutes deux perdues dans la mauvaise religion ; qu’elles ont communiqué avec l’infâme race des étrangers ; qu’elles ont vu le prêtre étranger et, sans craindre la sévérité des prohibitions, l’ont impudemment caché dans leur maison. En considérant des fautes si graves, il est manifeste pour tous qu’on ne peut les laisser même un seul jour entre le ciel et la terre. Qu’on leur donne donc le poison, et qu’on les fasse mourir ensemble. »

Cet ordre fut exécuté immédiatement, et quelques heures après, on porta le poison aux deux princesses chrétiennes. La tradition rapporte qu’elles refusèrent de le prendre elles-mêmes, afin de ne pas se rendre coupables du crime de suicide, et qu’on dut recourir à la force pour le leur faire avaler. Ainsi périrent victimes de leur foi et de la généreuse hospitalité qu’elles avaient donnée au prêtre persécuté, Marie Song et sa belle-fille Marie Sin. On n’a pas d’autres détails sur leur fin édifiante ; et les palais sont ici tellement fermés, tellement séquestrés de toutes relations extérieures, qu’il ne faut pas s’en étonner. Les longues infortunes de ces malheureuses princesses furent, dans les secrets desseins de la Providence, la cause de leur conversion et de leur bonheur éternel, car Dieu se plaît souvent à choisir ceux que le monde rejette. Elles eurent le mérite d’être constamment fidèles à la grâce, et de donner, par leur ferveur et leur résignation, aussi bien que par leur nom et leur dignité, un grand encouragement à la chrétienté naissante.

Leur mort entraîna naturellement celle de plusieurs servantes du palais, qui avec elles avaient embrassé la foi, et s’étaient dévouées au service du prêtre. Elles subirent la même condamnation, mais, d’après la tradition, elles durent aller recevoir le poison dans une maison réservée à cet effet en dehors de la petite porte de l’Ouest. Leur nombre et leur nom sont restés inconnus. Il est certain qu’il y en eut au moins deux martyrisées ; quelques-uns en portent même le nombre à cinq.

La condamnation des princesses amena par contre-coup celle du prince Ni In, époux de Marie Song, déjà exilé à Kang-hoa, par suite de la prétendue rébellion de son fils. Ses ennemis prétendirent que les rapports du prêtre avec les princesses, ne pouvaient avoir d’autre but que la machination de quelque complot monstrueux contre la sûreté de l’État, complot dont, sans aucun doute, le prince Ni In était le moteur secret. Ils