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plus complètement, et se procurer la seule chance de le revoir un jour au ciel, que de se faire chrétien comme lui. La grâce de Dieu aidant leurs paroles, Hei-ieng-i se convertit sincèrement, et ne lit plus avec eux qu’un cœur et qu’une âme. On croit qu’il fut baptisé dans la prison.

Le gouverneur cependant laissait traîner les choses en longueur, et n’osait point faire exécuter de suite la sentence de mort qu’il avait portée. Les sentiments personnels du roi lui étaient connus, et il craignait de se compromettre. Mais aussitôt que l’édit de persécution eut été publié par la régente, il fit comparaître de nouveau les confesseurs, et ordonna de les torturer cruellement. C’est dans cet interrogatoire que Pierre Tsio Iong-sam-i répondit : « Il n’y a pas deux Seigneurs au ciel, et l’homme n’a pas deux cœurs. Mon seul désir est maintenant de mourir pour Dieu. Il est inutile de m’interroger davantage, je n’ai rien autre chose à dire. » Il fut alors fustigé d’une manière si atroce, qu’un ou deux jours après, le 14 de la deuxième lune, il rendit le dernier soupir, après avoir été baptisé dans la prison, car il n’était que catéchumène.

Le bruit courut bientôt qu’il apparaissait du feu sur l’endroit où son corps avait été déposé. Les satellites et un grand nombre de curieux allèrent s’en assurer, et virent, non du feu, mais une lumière étrange au-dessus du tombeau. Les chrétiens de cette province ont conservé pour Pierre une grande vénération, et souvent encore on les entend parler de lui avec un respect et une confiance extraordinaires.

Les autres prisonniers furent conduits à la capitale. Le tribunal Keum-pou confirma de suite la sentence de mort, et afin de frapper de terreur les populations, ordonna qu’ils fussent reconduits dans leur propre district de Nie-Tsiou, pour y être exécutés. Le 13 de la troisième lune (25 avril 1801), ils furent tous les cinq décapités en dehors des murs de cette ville. Jean Ouen n’avait que vingt-huit ans ; Marcellin T’soi en avait cinquante-trois ; Martin Ni et Tsieng Tsong-ho, avaient environ cinquante ans ; nous ignorons quel était l’âge de Im Hei-ieng-i. Cinq soldats avaient été chargés de trancher la tête aux martyrs. Mais le moment venu, quatre d’entré eux se refusèrent à cet office, et le cinquième seul consentit à les tuer tous. Quelques instants après, ce malheureux poursuivi, disait-il, par les ombres sanglantes de ses victimes, alla se précipiter dans la rivière, et s’y noya.

Ce même jour, 25 avril, la ville de Iang-keun eut aussi ses