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Il visita aussi plusieurs fois le palais Iang-tsiei-kong ou Piei-kong, et probablement y séjourna quelque temps. Ce palais appartenait à un frère bâtard du roi nommé Ni In ou Il-oang-sou, dont le fils Tam avait été mis à mort, comme coupable de conspiration. Les grands eussent voulu aussi qu’on fît mourir le père, mais le roi ne l’avait pas permis, et s’était contenté de l’exiler dans l’île de Kang-hoa. Il n’était resté dans son palais Piei-kong que deux femmes, l’épouse du prince exilé, et sa belle-fille, veuve de Tam. Une chrétienne, ayant pitié de leur infortune, leur parla de religion vers l’année 1791 ou 1792. Le malheur avait préparé leurs âmes, elles se convertirent, mais personne n’osait avoir de rapport avec elles sous le prétexte que cela pourrait attirer de fâcheuses affaires. Seule, la généreuse Colombe n’eut pas cette crainte ; elle alla voir les deux princesses, conduisit même le prêtre chez elles, et leur fit recevoir les sacrements. La femme de Ni In s’appelait Marie Song, et sa belle-fille Marie Sin. Elles devinrent toutes deux très-ferventes, convertirent plusieurs de leurs esclaves, et s’agrégèrent à la confrérie Mieng-to, ou de l’instruction chrétienne. Elles étaient heureuses de recevoir le prêtre dans leur palais. Lorsqu’il s’y trouvait, il était caché dans une chambre séparée, attenante à la maison de Hong An-tang, et communiquant avec cette dernière par un trou secrètement pratiqué dans la muraille. Le prince exilé eut connaissance de ce qui se passait dans son palais, et n’y mit aucun obstacle. Cependant lui-même ne se fit jamais chrétien.

Le P. Tsiou fit aussi plusieurs tournées dans les provinces. Il alla au district de Nie-tsiou, dans la famille du martyr Paul Ioun, son introducteur. Il résida quelque temps chez Augustin Niou Hang-kem-i, à Tso-nam-i, district de Tsien-tsiou, province de Tsien-la, On sait aussi qu’il passa dans les districts de Ko-san, Nam-po, Kong-tsiou, On-iang, et dans le Nai-po. Mais à quelle époque précise fit-il ces différentes excursions ? avec quel succès ? nous l’ignorons. Les mémoires du temps ne nous ont laissé aucun détail. Ce qui est certain, c’est que la plupart des fidèles ne purent alors participer à la réception des sacrements, à cause du secret inviolable qui devait partout protéger le missionnaire, et des autres difficultés de tout genre, causées par la persécution.

Les chrétiens sont du reste unanimes à faire l’éloge du P. Tsiou. Ils nous le représentent infatigable au travail, se réservant à peine le temps nécessaire pour manger et pour dormir. La nuit, il exerçait le saint ministère ; le jour, il traduisait des livres ou