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la fonction de catéchiste chargée de tout ce qui concernait l’instruction des femmes, emploi dont elle s’acquitta avec autant d’activité que d’intelligence. Lorsque le missionnaire fut trahi et poursuivi par les satellites, Colombe, avertie à temps, conçut la généreuse pensée de le sauver. Elle le cacha dans le bûcher de sa maison, et l’y nourrit pendant trois mois à l’insu de tous, et même de sa belle-mère et de son fils Philippe. Elle était cependant très-affligée de ne pouvoir offrir au prêtre un asile plus commode, mais elle n’osait pas se confier à sa belle-mère, qu’elle voyait bien éloignée de ses généreuses dispositions. Elle entreprit cependant de toucher son cœur. Elle se mit à pleurer et à gémir presque continuellement : elle ne mangeait et ne dormait presque plus. Sa belle-mère, craignant de la perdre, voulut savoir la cause de son chagrin. Colombe lui dit : « Le prêtre est venu ici, au péril de sa vie, pour sauver nos âmes, et nous n’avons rien fait pour reconnaître ses bienfaits, et il est aujourd’hui sans asile. À moins d’être de pierre ou de bois, comment ne serais-je pas vivement affligée à cette pensée ? Je vais donc m’habiller en homme, et parcourir le pays pour tâcher de le trouver et de le secourir. — La belle-mère répondit en pleurant : Si vous agissez ainsi, qui aurai-je pour appui ! Je vous suivrai donc et je mourrai avec vous. — Vénérable mère, reprit Colombe, je suis bien consolée de voir à quel degré de vertu vous êtes arrivée. Je ne craindrais certainement pas d’exposer ma vie pour sauver le missionnaire, mais dans des circonstances si difficiles, nous ne pourrions pas le trouver, et nous nous exposerions inutilement. Le Seigneur du ciel qui sait tout, et qui pénètre le cœur des hommes, voit notre bonne volonté, et il permettra peut-être que le Père vienne près de nous. S’il se présentait, oseriez-vous le recevoir ? Si vous me donnez l’assurance de votre consentement, votre fille aura aussitôt l’âme en paix. Elle reprendra sa joie première, et s’acquittera envers vous jusqu’à la mort des devoirs de la piété filiale. — La mère répondit : Je ne veux pas me séparer de vous, faites tout ce que vous voudrez. » — Aussitôt Colombe tressaillant de joie courut à la cachette du prêtre, et l’introduisit dans la salle d’honneur. Ce fut là que le P. Tsiou, protégé par l’usage coréen qui interdit aux étrangers l’entrée des maisons nobles, fit sa résidence habituelle pendant trois ans.

Au mois de septembre 1796, le P. Tsiou écrivit à l’évêque de Péking, pour lui faire connaître sa position et l’état de la chrétienté coréenne. Les continuelles perquisitions de la police,