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entraîner dans une mauvaise doctrine mêlée de magie, et s’est engagé avec serment à aller dissuader tous ceux qu’il avait endoctrinés, afin de les ramener dans la voie véritable. » Le roi répondit par un ordre de ne relâcher le coupable qu’après un retour positif et complet, car sa conversion était bien récente. Toutefois il fut mis en liberté, le 5 de cette même lune, et put retourner chez lui. Le rapport du gouverneur de Hong-tsiou est évidemment empreint d’une monstrueuse exagération. Quels qu’aient pu être les torts de Louis, sa faiblesse n’a pu aller jusqu’à s’engager par serment à faire apostasier les chrétiens. La meilleure preuve, c’est qu’aussitôt mis en liberté, il recommença à pratiquer tous les devoirs de la religion. Mais comme il était trop connu dans le Nai-po, il prit le parti d’émigrer pour être moins exposé à de nouveaux périls. Dans la nuit du dernier jour de cette année (1791), il fit ses adieux à son frère aîné. Non-seulement plus de trente familles de sa parenté qui habitaient en ce lieu, mais encore tous les habitants du village, composé de plus de trois cents maisons, s’étaient réunis autour de lui. C’était lui qui leur avait fait connaître Jésus-Christ, lui qui les avait convertis et baptisés ; aussi semblait-il que chacun perdit un père, un frère, un ami. Son départ fut une scène déchirante. Il alla s’établir au district de Hong-san, et recommença à travailler à la prédication de l’Évangile, quoique avec beaucoup moins d’éclat et de publicité. Nous aurons plus tard le bonheur de raconter son martyre.

Dieu, qui avait, dans ses secrets desseins, permis tant de chutes, ne voulut pas cependant que les ennemis de son nom pussent se flatter d’un triomphe complet. De grands et glorieux exemples de fidélité vinrent consoler l’Église naissante de Corée. Dans le district de Mien-tsien, où les arrestations avaient été très-nombreuses, Laurent Pak, voyant les chrétiens emprisonnés depuis plusieurs mois, avait eu le courage d’aller souvent les consoler dans leurs cachots. Un jour, pendant que les prisonniers prenaient leur repas du matin, il alla frapper à la porte du mandarin, entra hardiment, et, se tenant debout en face de ce magistral, s’écria : « Battre avec violence des hommes innocents, les tenir en prison pendant des mois entiers, n’est-ce pas là un crime horrible ? » Le mandarin, en colère, demanda quel était cet homme. On lui répondit que c’était un habitant de Hong-tsiou, frère de Pak Il-tenk-i, alors en prison pour cause de religion. Laurent fut saisi aussitôt. On lui passa une lourde cangue au cou et on le battit violemment. Loin de se laisser ébranler,