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sanction royale, fut expédié au gouverneur de Tsien-tsiou. À la réception de la sentence, les deux confesseurs furent aussitôt conduits de la prison au lieu du supplice. Une foule immense de païens et de chrétiens les suivait. Jacques, affaibli par les coups qu’il avait reçus, se contentait de prononcer de temps en temps les noms de Jésus et de Marie. Paul, plus robuste, s’avançait avec un air d’allégresse, allant à la mort comme à un festin, prêchant Jésus-Christ avec tant de dignité que, non-seulement les chrétiens, mais les païens eux-mêmes étaient ravis d’admiration.

Arrivés au lieu de l’exécution, l’officier qui présidait leur demanda s’ils voulaient obéir au roi, rendre le culte ordinaire aux tablettes de leurs ancêtres, et renoncer à la religion étrangère. Sur leur réponse négative, l’officier commanda à Paul Ioun de lire la sentence de mort, confirmée par le roi, et écrite sur une planche, suivant l’usage du royaume. Paul la prit aussitôt et la lut à haute voix. Il posa ensuite sa tête sur un gros billot, répéta plusieurs fois les saints noms de Jésus et de Marie, et, avec le plus grand sang-froid, fit signe au bourreau de frapper. Le bourreau lui trancha la tête d’un seul coup. Puis vint le tour de Jacques, qui ne cessait, lui aussi, d’invoquer Jésus et Marie. Il eut la tête tranchée immédiatement après son cousin. Il était trois heures de l’après-midi, le treizième jour de la onzième lune de l’année sin-haï (8 décembre 1791). Paul Ioun était âgé de trente-trois ans, et Jacques Kouen de quarante et un ans.

Le roi cependant s’était repenti d’avoir cédé aux instances de son ministre. Il prévoyait que, d’après les mœurs et coutumes du pays, ce premier acte deviendrait loi de l’État, et que dans la suite on continuerait à mettre à mort ceux qui suivraient la religion nouvelle. Un courrier extraordinaire fut envoyé en toute hâte au gouverneur de Tsien-tsiou pour faire surseoir à l’exécution. Mais il était trop tard ; Paul Ioun et Jacques Kouen avaient déjà obtenu la couronne du martyre.

Comme le roi l’avait prévu, les ennemis de la religion s’appuyèrent toujours depuis sur cette sentence, pour faire considérer la condamnation à mort des chrétiens comme loi de l’État, et la première exécution publique fut la principale et souvent l’unique cause d’un grand nombre de celles qui suivirent. Les corps des deux martyrs restèrent neuf jours sans sépulture. Pour intimider les chrétiens, on plaça sur le lieu du supplice des satellites chargés de les garder jour et nuit. Le neuvième jour, les parents qui avaient obtenu du roi la permission de les ense-