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famille, déjà dans les honneurs au temps des Korie, s’était, lors du changement de dynastie, ralliée une des premières au nouveau roi, et depuis, son crédit n’avait fait qu’augmenter. Kouen T’siel-sin-i, surnommé Nok-am, le promoteur des conférences de la pagode dont il a été question au commencement de cette histoire, et l’un des plus célèbres docteurs du temps, en était alors le chef. Il était l’aîné de cinq frères, tous renommés pour leur science et leur bonne conduite, parmi lesquels on distinguait surtout le troisième, Il-sin-i surnommé Tsik-am. Les cinq frères Kouen avaient un grand nombre de disciples, venus de toutes les parties du royaume. Piek-i pensa donc qu’il serait très-utile de convertir ces savants et d’en faire les propagateurs et les soutiens de la religion.

À la neuvième lune de cette même année kap-tsin (1784), il se rendit dans leur maison à Kam-san, dans le district de Iang-Keun. Dès qu’il fut arrivé, les conférences sur la religion recommencèrent, et bientôt la vérité brilla dans tout son jour. L’aîné, T’siel-sin-i, âgé d’environ cinquante ans, qui avait passé sa vie à approfondir la philosophie et la morale des livres sacrés des Chinois, hésita d’abord. Sans résister à la lumière de l’Évangile, il ne pouvait se décider à perdre en un instant tout le fruit des immenses travaux qui avaient fait sa réputation. Ce ne fut qu’un peu plus tard qu’il embrassa la religion, et fut baptisé sous le nom d’Ambroise. Sa foi constante et sa sainte vie lui méritèrent une belle couronne, comme nous le verrons dans la suite. Mais le troisième frère Il-sin-i se convertit de suite, et bientôt sa ferveur extraordinaire, son zèle éclairé, justifièrent pleinement les espérances de Piek-i. Non content de pratiquer lui-même, il se mit à instruire tous les membres de sa famille et commença à prêcher la foi à ses amis et connaissances, avec tout le succès que lui assurait l’autorité de son nom, de sa science et de ses vertus. Dieu bénit tellement ses efforts, que le district de Iang-Keun peut, à juste titre, être considéré comme le berceau de la religion en Corée.

Ce fut vers ce temps que Pierre Seng-houn-i, qui avait reçu le baptême à Péking, conféra lui-même ce sacrement à Piek-i et à Il-sin-i. Le choix des noms de baptême ne se fit pas d’une manière indifférente. Ni Piek-i avait commencé l’œuvre de la conversion de la Corée : il avait ainsi préparé les voies à la venue du Sauveur, Il fut décidé qu’il s’appellerait Jean-Baptiste. Kouen îl-sin-i, voulant se consacrer à la prédication de l’Évangile, prit pour son patron saint François-Xavier, l’apôtre de l’Orient, afin