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se sentit ému de compassion à la vue du jeune orphelin, le prit en affection, et chargea un de ses parents d’en avoir soin jusqu’à la fin de la guerre. Il confia ensuite son éducation aux Jésuites, qui l’instruisirent de la religion et le baptisèrent. Le jeune Cafioïe, autant par affection que par reconnaissance, ne voulut plus se séparer de ceux qui l’avaient engendré à Jésus-Christ ; il les accompagna toujours dans leurs courses apostoliques, et fut enfin pris et conduit avec eux dans les prisons de Chimabara. Quelque affreuse que fût cette prison, les saints confesseurs ajoutaient encore des austérités volontaires à leurs souffrances. On avait choisi les gardes les plus brutaux, pour accroître la dureté de leur détention ; mais la vie angélique des prisonniers, leur patience, et un air de sainteté qui paraissait sur leur personne, adoucissaient insensiblement la férocité de ces satellites. Ils commençaient par admirer une religion qui élève l’homme au-dessus de lui-même, et finissaient souvent par l’embrasser. Aussitôt qu’on apercevait en eux quelques sentiments d’humanité, on leur substituait d’autres geôliers, qui bientôt se trouvaient vaincus à leur tour. À la fin, le gouverneur furieux commit le soin des confesseurs à un officier de ses parents, qui était plus semblable à une bête féroce qu’à un homme. Sa haine contre le christianisme ne connaissait point de bornes ; cependant, dès qu’il eut vu les prisonniers, il se sentit ému, et au bout de huit jours se déclara chrétien. Le gouverneur aussi surpris qu’irrité de cette conversion, n’épargna ni reproches ni menaces pour ramener le néophyte au culte des idoles. Cet officier lui répondit invariablement : « Vous pouvez me dépouiller de mes emplois, m’enlever mes biens, m’ôter même la vie ; mais vous ne pourrez rien sur mon esprit, je vivrai et mourrai chrétien. »

Le gouverneur voyant que la rigueur de la prison était inutile, se résolut à tourmenter les confesseurs, mais séparément, afin qu’ils ne pussent pas s’encourager les uns les autres, Il commença par Cafioïe ; croyant qu’un étranger serait vaincu plus facilement. Il le fit venir chez lui, le combla d’amitiés et de caresses, lui fit les promesses les plus séduisantes, et le menaça en même temps des plus horribles supplices, s’il n’obéissait à l’heure même. Le néophyte coréen lui répondit simplement : « Je suis chrétien et je ne renoncerai jamais à ma religion. » À l’instant même, il le fil exposer tout nu à un vent glacial, et oubliant en même temps le caractère de juge dont il était revêtu, il n’eut pas honte d’exercer la fonction de bourreau. Il tenailla de ses propres mains le saint confesseur, qui ne faisait que rire d’un si horrible