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simplicité, et elle paraît ne le céder en rien aux Japonais, Il a plu à Dieu Notre Seigneur de prendre ces prémices du royaume de Corée, à l’occasion de cette guerre, pour le plus grand bien de leurs âmes. L’opinion commune, dans les entretiens qu’ils ont entre eux, est que si la prédication de la loi évangélique pénétrait une fois en Corée (ce qui semble ne devoir pas être difficile par la voie du Japon), elle y serait très-facilement reçue, et pourrait prendre dans ce royaume de grands développements[1]. »

Ces belles espérances ne furent point réalisées. En 4598, Taïko-Sama, se sentant mourir, envoya à ses troupes l’ordre formel d’abandonner toutes leurs conquêtes, et de revenir de suite au Japon. Les tuteurs de son fils pressèrent l’exécution immédiate de cet ordre, et la Corée tout entière, sauf le poste militaire de Fusan-kaï sur la côte sud-est, se retrouva sans coup férir sous l’autorité de son propre roi.


Les troupes japonaises, en quittant la Corée, y laissèrent-elles quelques germes de christianisme, et faut-il faire remonter à cette expédition la véritable origine de l’Église coréenne ? On l’a dit et répété dans ces derniers temps ; mais cette assertion ne soutient pas un examen sérieux.

Pendant son séjour en Corée, l’an 1594, le P. de Cespedes n’avait vu d’autres indigènes que les prisonniers de guerre que l’on expédiait au Japon pour y être vendus comme esclaves. Les lettres écrites alors par les jésuites du Japon à leur Père général prouvent qu’il lui avait été impossible d’entrer en relation avec les gens du pays. En effet, la tactique des Coréens était d’isoler les Japonais, en dévastant complètement la contrée autour des forteresses qu’ils occupaient ; la plupart des habitants avaient fui dans les provinces septentrionales ; les autres reculaient devant les envahisseurs, et, à leur approche, cherchaient un refuge dans les bois et les montagnes. Après le départ du P. de Cespedes, l’armée japonaise resta encore plus de trois ans en Corée, mais le zélé missionnaire ne put y revenir, et aucun autre prêtre ne fut envoyé à sa place. Les Japonais chrétiens ne purent, pas plus que lui, se mettre en rapport avec les habitants ; d’ailleurs la haine innée des Coréens pour tout ce qui est étranger, l’exaspération naturelle d’un peuple vaincu contre ses vainqueurs, auraient certainement fait échouer toute tentative de prosélytisme. Les Coréens emmenés au Japon comme prisonniers de

  1. Lettre annuelle du Japon pour 1595. — Rome, 1599. — p. 136 et suivantes.