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ESSAI POLITIQUE SUR LE COMMERCE. CHAPITRE ï. Principes. On suppose trois îles seules sur la terre. Chaque île, de même éten- due et d’un égal nombre d’habitants, n’a porté jusqu’à présent que d’une sorte de denrée, à laquelle son terroir est le plus propre ; l’une du blé, l’autre de la laine, et la troisième des boissons. La même quantité d’hommes est employée au travail , et la récolte est suffisante pour fournir aux trois îles. Il en résulte d’abord un commerce nécessaire ; en sorte que chaque île, en se réservant la quantité suffisante de sa denrée, échangera le reste pour avoir sa provision des autres îles. Les besoins et les échanges seront égaux, et par conséquent la balance du commerce sera égale. Mais si l’une des îles devenait assez cultivée pour avoir sa provision de ce qui croît dans les autres , et de plus une surabondance de sa propre denrée qui leur manque , qu’est-ce que l’on prévoit devoir ar- river dans la politique et dans le commerce ? Si c’est l’île du blé , comme les deux autres îles ne peuvent s’en passer, le premier mouvement de chaque habitant sera d’aban- donner son île, et d’aller travailler dans l’île du blé, pour mériter sa nourriture. Mais si ces îles entendent bien leurs intérêts, et que leur terrain ne leur fournisse pas suffisamment de blé , elles contraindront l’île du blé d’en semer la quantité nécessaire pour les nourrir, en échange de leurs denrées, dont la culture lui sera interdite ; et après avoir subi ces conditions, elle ne peut les enfreindre que par une révolte, punis- sable de la perte de sa liberté. Et c’est là le droit naturel et primitif des nations , selon lequel le droit d’une nation particulière cède au droit des autres nations ensem- ble ; de même que le droit d’une famille ou d’un particulier cède à celui de sa nation. Si l’île du blé se trouvait, par sa situation ou par d’autres circon-