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et demeurer sourd à ce qu’il croyait un appel lui paraissait une lâcheté ; quant à se compromettre définitivement, il ne s’en estimait pas capable.

La présomption est mauvaise conseillère ; une conscience tourmentée l’enseigne à Jacques avec persévérance. Il n’est plus le syntaxiste qui fait de la chasteté une vertu acquise et scellée à jamais. Un jour était venu où le garçon avait entendu en lui un bruit sourd et répété de brisure, comme du côté de Montmorency, dans les carrières, sur le coup de midi. Le passé croulait en des pleurs prolongés sans raison, au retour des vacances, et hantés de peur folle, ou flambait dans la brûlure de la chair et des nerfs. La chose s’était faite en vitesse. Sans préparation, sans autre soutien que la piété par trop ingénue et d’ailleurs entamée de son enfance, sans directeur spirituel, sans confident, Jacques avait feint d’ignorer, puis il avait bien fallu lutter ; il avait succombé. Il se traînaillait au confessionnal et reprenait sa marche à tâtons vouée à la défaite et à l’écœurement.

Quelle puissance le soutenait malgré tout dans cet apprentissage répugnant qui n’en finissait plus et qui souillait son avenir ? Il conservait une horreur presque physique du péché, de tout péché, à telle enseigne que ses camarades respectaient une conscience qu’ils croyaient intacte. Jacques était plus humilié de ce malentendu que de ses rechutes. Il essayait en vain de la prière ; il n’y trouvait plus rien. Et cette sécheresse durait. Pour combien de temps encore ? La présomption, en ces conjonctures, équivalait à de la témérité ; il n’était pas nécessaire de se dédire.