Page:Dablon - Le Verger, 1943.djvu/156

Cette page a été validée par deux contributeurs.

porte du Père Spirituel depuis la mort de Monsieur Richard.

Jacques est aux prises avec son débat intérieur et cette fois il n’usera pas ses forces à des escarmouches. Sous le couvert du règlement, il vague hors du collège. Quel parti il prendra, peu lui importe ; il ne veut savoir qu’une chose : les atermoiements traînent avec eux la douleur et la honte, pour lui et pour d’autres. Il a cru un instant trouver un point de départ en la confidence de Noël ; il a dû remonter plus haut. Pourquoi, sous prétexte de chercher un livre, s’est-il réfugié au plus creux de la maison lorsque Monique lui a dit que Louise et Estelle priaient auprès du corps ? Maurice, envoyé en ambassade le lendemain, n’a pas été plus heureux. C’est donc un fait ; il a commencé de torturer Louise. Il ne se permettra pas plus longtemps une satisfaction où son égoïsme et sa lâcheté prennent leur complaisance. À la prochaine entrevue, Jacques aura définitivement opté pour le monde, ou bien il parlera.

D’ailleurs les condoléances de la jeune fille eussent infailliblement gâté l’idée que Jacques s’était faite d’elle, et l’eussent aigri comme le parfum des fleurs passées. Il redoutait le moment où le souvenir et la réalité entrent en contact. À quoi bon s’exposer encore une fois à la déception ? Depuis le mariage de Monique, depuis la mort de son père, le dégoût du monde l’empêchait de rendre justice à qui que ce fût. Après Louise, Monique ; puis il avait trouvé moyen de rembarrer la vieille Marie avant de partir ; de retour au collège, il chargeait Voilard des péchés du monde. Voilard faisait-il autre chose que défendre sa peau ?